Pages précédentes L'ART ARABE  AL. GAYET LIVRE III. - CHAPITRE I. Pages suivantes
   Retour page Table des matières  
   
   d'autres constructions innombrables encore, qui servaient d'habitation aux fonctionnaires, aux officiers, aux courtisans, aux femmes, aux esclaves et à la valetaille, ou de magasins où s'entassaient les trésors et jusqu'aux approvisionnements de tout genre nécessaires au khalife et à cette armée qui était sa cour.

A l'intérieur, le luxe tenait du conte de fée. Le Kasr-ed-Dahab avait sa salle d'or - Kaat-ed-Dahab - et sa salle d'argent - Kaat-el-Feddah. L'une était la salle du trône, l'autre la salle d'audience. L'or flamboyait sur tous les murs, le trône était d'or constellé de gemmes et exhaussé sur une estrade d'or; des palmiers d'or, chargés de fruits et de fleurs de pierreries, y figuraient des bosquets dans lesquels des oiseaux d'or, émaillés de toutes couleurs, faisaient entendre leur ramage. La salle du lotus, au Kasr-ez-Zoumourroud, avait ses poutres plaquées d'or et semées d'émeraudes... La salle des banquets était merveilleuse. Nassiri-Khosrau, qui la visita, relate dans son voyage cette impression qu'elle lui causa : " J'avais beaucoup entendu parler de la salle des festins, je désirais la voir. Le dernier jour du mois de Ramadan 440 (7 mars 1049), on avait disposé la salle dans laquelle, le lendemain, jour de la fête, devait se rendre le khalife pour assister au festin après la prière. Je franchis la porte du palais et je vis une suite de bâtiments, de terrasses et de salles dont la description, si je la tentais, grossirait beaucoup mon ouvrage.

" Il y avait douze pavillons de forme carrée. Quand on entrait dans un, on le trouvait plus beau que celui qu'on venait de quitter. Chacun d'eux avait une superficie de cent ârech carrés, à l'exception d'un seul qui n'en avait que soixante. Dans ce dernier était dressé un trône occupant toute la largeur de la salle. Il avait quatre guez de haut et autant de large. Trois de ses faces étaient en or et représentaient des scènes de chasse, des cavaliers faisant courir des chevaux, et d'autres sujets. Au milieu d'eux se détachaient des inscriptions tracées en très beaux caractères. 

    

 

   

 Les tapis et les tentures de cette salle étaient en satin et en bougalemoun (étoffe à reflets changeants) tissés expressément sur la mesure de la place où ils devaient être posés. Une balustrade en treillage d'or entourait le trône, dont la beauté dépassait toute description. Ce trône était si merveilleux, qu'un volume tout entier ne suffirait pas à en décrire tous les détails... " Le désir du khalife s'était accompli, le luxe de Baghdad était surpassé.

Rien n'est resté de ce palais, et tout au plus peut-on en retrouver la place. Certains pans de mur, certaines salles existent encore, perdus au milieu de masures sordides adossées à leurs pieds. Il est regrettable que jamais archéologue n'ait entrepris de rechercher tout au moins le plan de ce groupe d'édifices et qu'aucun travail sérieux ne lui ait été consacré. Le temple de la ville nouvelle rivalisait de grandeur et d'opulence avec le palais. Ce temple, c'est Gama-el-Azhar, - la mosquée fleurie, - nommé ainsi par allusion au surnom de Zarah; - fleur, - donné à Fatimeh, la fille du Prophète, dont El-Moëzz se prétendait le descendant.

Ses dispositions générales sont encore celles de la mosquée primitive. Mais, moins scrupuleux que Touloûn, Djauhar n'hésita pas à dépouiller les églises coptes au profit de son monument. Trois cent quatre-vingts colonnes de marbre, de granit et de porphyre, arrachées à leurs nefs, vinrent prendre rang dans son sanctuaire et ses liwans. Cette spoliation ne contribuait pas peu à donner à l'architecture d'El-Azhar un caractère marqué d'élancement qui, dans la mosquée de Touloûn, n'est qu'à l'état embryonnaire; car, en même temps que le support se faisait plus frêle, l'arc devenait plus aigu et les baies percées dans l'axe des colonnes dépassaient la hauteur des tympans, pour monter jusqu'au faîte que crénelait une rangée de merlons à cinq ressauts.

 
Pages précédentes   Retour page Table des matières   Pages suivantes