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De son règne datent une foule de monuments dont il ne reste rien ou tout au plus d'informes ruines. La plupart peuplaient le désert où chaque nuit il croyait entendre la voix d'Allah. Là, se voyaient alors la mosquée du Fanal et la mosquée de l'Observatoire. Sur la tour de l'une brillait un feu soigneusement entretenu ; sur celle de l'autre se tenaient les astronomes du khalife, et, à côté de ces mosquées perdues dans le sable, nombre de chapelles funéraires étaient venues se ranger. Ce sont elles qui les premières se couvrirent de voûtes. Les auteurs que j'ai consultés sur ce point sont confus dans leurs récits : seul le fait est certain. Autant qu'il est possible d'en juger, l'édifice comprenait une petite nef et une salle carrée où se trouvait la tombe; celle-ci, surmontée d'une coupole, celle-là d'un berceau ogival. Sous le règne de Mostanser-b-Illah, une mosquée qui subsiste encore sur la lisière du plateau du Mokattam, Gama-el-Guéïouchî1 est déjà entièrement bâtie dans ce style. Un vestibule précède une profonde nef voûtée, et sur la droite de celle-ci une salle carrée s'ouvre, nimbée d'un dôme appuyé à quatre trompes coniques identiques à celles des monuments coptes du Fayoum ou d'Assouan. Ainsi constituée, cette architecture s'affermit : toutes les tombes des princes et des émirs marquent autant de progrès réalisés à travers lesquels se lit toujours la recherche de l'élancement. La coupole, d'abord à peine ovoïde, de même que la coupole copte s'allonge ; engendrée primitivement par une courbe elliptique, elle l'est bientôt par un arc brisé aigu. A en juger par les conséquences qu'eut cette évolution, elle fut dictée par un sentiment de mélancolie profonde : elle apparaît comme une conception de " la délectation morose " où s'abîma El-Hakim. Car si la coupole fut adoptée par l'art arabe, ce ne fut que pour servir de dais à la tombe. Elle devint rapidement l'un des éléments constructifs de la chapelle funéraire, plus tard , sous les sultans de la mosquée sépulcrale ; 

 

1. Voir, dans le Bulletin de l'institut du Caire, la remarquable étude consacrée à cette mosquée par M. Max van Berchem.

    

 

   
mais encore ne repose-t-elle jamais sur le temple, mais sur la salle qui renferme le cercueil. Les mosquées royales ou collégiales auxquelles ne furent point attachés de tombeaux n'eurent jamais de coupoles, et quand les sultans Baharites et Bardjites se bâtirent des sépultures immenses attenantes à leurs mosquées, le dôme fut rejeté en dehors du vaisseau du sanctuaire et ne s'étendit jamais que sur ces tombeaux.
 

III. - FORMATION DU DÉCOR POLYGONAL.

 

Tandis que s'opère cette évolution de l'architecture, la sculpture, guidée par les mêmes principes, elle aussi, se modifie. A la mosquée d'El-Azhar, elle s'inspire encore directement du style copte; sur l'axe de chaque arc est une rosace; le sommet des fenêtres des tympans se remplit d'une imposte sculptée, qu'on croirait moulée sur quelque stèle d'Akhmim ou de Salamieh, et les rinceaux des frises ou des boiseries ont des feuillages composés (fig. 17 et 23), que seul le fini de l'exécution distingue des enroulements coptes.

 
Fig. 23. - Sculpture fatimite.
 

Pourtant, un courant irrésistible entraîne l'Arabe vers le fantastique, et les premières arabesques fleurissent. C'est au musée arabe du Caire qu'il faut chercher ce qu'elles furent au temps d'El-Moëzz. Deux portes d'El-Azhar sont particulièrement remarquables L'une a deux vantaux de plus de trois mètres de haut. Sur chacun d'eux quatre panneaux accouplés sont encadrés par des panneaux plus étroits. 

 
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