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De la sorte, les plates-bandes et les archivoltes portent directement sur les pieds-droits sans exercer de poussées au vide ; et les pierres emboîtées ne forment qu'une masse dont la force s'use à rompre les joints établis. En fait, ces découpures se sont émiettées malgré l'arc de décharge dissimulé qui le plus souvent les a protégées. Mais, quels que fussent les défauts de ces appareillages, l'effet décoratif obtenu par eux l'emportait sur toute autre considération, à ce point que, sur nombre de linteaux monolithes, on poussa la minutie jusqu'à se servir de revêtements de marqueterie polychrome afin de pouvoir les figurer mieux. Logiques ou non, elles témoignent d'une connaissance parfaite de la coupe des pierres; elles sont innées au goût arabe, et trop élégantes pour qu'on puisse les lui reprocher.
 
Fig. 58.
 

La structure de la stalactite plus encore relevait de la géométrie et plus encore était régie par les principes absolus où gît toute la philosophie de l'art arabe; ces lois immuables de l'assemblage, 

    

 

    si puissantes qu'elles nous disent mieux que les récits des historiens et des poètes ce que l'Arabe a cru et aimé.

Introduite dans l'art par l'emploi de la coupole surélevée, la stalactite resta quelque temps d'abord attachée au pendentif de la voûte, et sous les Fatimites les parties saillantes de la construction ne sont le plus souvent soutenues que par des corbeaux ou des encorbellements formés de plusieurs consoles juxtaposées. Parfois un corbeau sert de base à une colonnette, comme à la mosquée d'Amrou ; parfois il amortit la portée d'une poutre ou la retombée d'un pan coupé, mais rien alors ne fait de lui un type architectonique spécial à l'art de l'Islam.

Quand l'engouement de l'Orient pour la stalactite l'enlève enfin de la voûte et l'emploie au rachat de toutes les parties surplombantes, la masse générale du corbeau n'est pas abandonnée pour cela. On se contente de la creuser de strates multiples (fig. 56), on ramène le plus possible ses ressauts à la courbure du penditif, et tout est dit.

L'idée se répandit alors de faire de ces supports isolés un support continu. Le moyen le plus simple était de les réunir côte à côte. Le détail du premier encorbellement donné prouve qu'effectivement il en fut ainsi.

Si déchiqueté qu'il soit en apparence, l'encorbellement en stalactites peut toujours se décomposer en éléments très simples; si nombreuses qu'en soient les strates, il n'est formé que de prismes verticaux soigneusement dissimulés. Ces prismes sont au nombre de sept et peuvent être ramenés en plan à trois polygones primaires : le triangle rectangle, le triangle isocèle et le parallélogramme. La gamme en est immuable, les rythmes qu'on en peut tirer infinis ; ils dépendent uniquement du mode d'assemblage et de l'harmonie des profils.

 
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