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Dans des rinceaux, des antilopes et des gazelles surgissent, passent et disparaissent; de loin, on dirait un lancé sous forêt; de près, ce n'est que la flore vivante d'une végétation animale bien coordonnée. En la dessinant, l'Égyptien est redevenu cet incomparable animalier que nous révèlent les bas-reliefs antiques et jusqu'aux ébauches coptes. Quant à la forme humaine, il la traite avec son dédain habituel de la chair et son parti pris d'idéalité.
Fig. 88 - Etoffe Fatimide.

Au mâristan, des frises de même époque prouvent d'une éducation artistique supérieure, bien que la donnée du décor reste la même. Un centaure couronné poursuit la gazelle à travers une forêt de lianes inextricables, et la chasse tantôt à courre, tantôt à l'arc (fig. 89). Des musiciens sont assis sous un berceau de verdure; l'un accorde son théorbe; l'autre assure ses cymbales à ses doigts. 

    

 

   
Des paons volètent sous le lattis du berceau et se perchent aux branches des lianes ; ailleurs, des danseurs s'avancent l'un vers l'autre -en brandissant des tambourins. Cette fois, la silhouette est champlevée au burin; rien n'en altère les contours; mais le relief se métamorphose en une polygonie composite. La poitrine du centaure est cuirassée d'arabesques, ses bras sont pris dans des manches de feuillages et sur son épaule et sa croupe s'installent des fleurons étoilés.
Fig. 89 - Boiseries du maristan de Kalaoun
Ce centaure des frises du mâristan n'est, d'ailleurs, qu'une variante d'une image mythique de l'Islam; le sphinx ailé, ou marichore, dont les théologiens musulmans disent : " Allah a placé dans l'Éden des animaux qui ont des pieds d'antilope, un corps de tigre et une tête de femme. Mahomet et Alî monteront chacun un de ces animaux au jour du Jugement dernier, pour distribuer aux élus l'eau paradisiaque du Kauther ", et que souvent on voit au revers des miroirs fatimites ou baharites. Quant aux scènes de chasse, elles y reviennent souvent aussi, pleines de réminiscences de celles dont sont ornés les miroirs pharaoniques. Ici, c'est un chasseur le faucon au poing ; là , un autre chasseur aux prises avec un jaguar ; sur un autre, un vol d'échassiers formant cercle, sur un autre encore, une antilope, un lièvre et un chien qui se poursuivent dans une zone arabescale. La porte de Beïbars a également, dans ses méandres fleuris, des lièvres et des colombes, qui ne diffèrent des sculptures précédentes que par la variété des détails. Les frises du Kasr-er-Radouan ont des aigles qui pour ailes ont des feuillages; la dalle de la fontaine El-Métoûalli (fig. 85) a, en bordure, une troupe de gazelles attaquées par des lions. Il serait puéril d'étendre cette nomenclature : à vouloir être complète, elle tomberait dans trop de redites et n'apporterait à la critique aucun argument nouveau.
 
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