Aussitôt après la prise de Grenade
(1492), ceux d'entre les Maures qui ne voulaient point supporter la
domination des chrétiens s'étaient établis de l'autre côté du
détroit, dans la province d'Oran. Exilés de l'Espagne, mal
accueillis de leurs coreligionnaires, contre lesquels ils avaient eu
souvent à combattre, ils occupèrent les points principaux du
littoral ; et, poussés qu'ils étaient par un irrésistible besoin
de vengeance, ils se firent écumeurs de mers : " Jamais,
déclare l'historien Galibert, les côtes de l'Espagne ne furent
plus tourmentées qu'à cette époque : on eût dit que les
Musulmans voulaient reconquérir par portion cette terre qu'ils
n'avaient pas su défendre, et leurs corsaires, s'acharnant à
l'attaque des rivages de l'Andalousie, semblaient s'efforcer d'en
arracher des lambeaux et de transporter en Afrique les débris de
leurs foyers ruinés. "
Ferdinand le Catholique voulut réduire
les pirates et prit l'offensive ; cinq mille hommes, sous le
commandement du marquis de Comarès, furent embarqués à Malaga et
dirigés sur Mers-el-Kébir, où ils entrèrent presque sans combat
(octobre 1504).
Mers-el-Kébir était un point
stratégique à conserver. Les Espagnols relevèrent les
fortifications et garnirent les remparts de pièces de fort calibre.
Le bey accourut avec sa milice pour les en déloger ; mais il
comprit bien vite qu'il lui serait impossible de livrer l'assaut et,
faisant la part du feu, il reconnut Comarès maître de la ville, à
cette condition expresse que la garnison n'en franchirait point
l'enceinte.
Dans les premiers temps, tout alla bien
: catholiques et musulmans vécurent en si bonne intelligence qu'on
se flattait dans l'entourage du roi " d'avoir conquis l'Afrique
à moitié ".
Malheureusement, le marquis de Comarès
avait de l'ambition : |