Pages précédentes GÉOGRAPHIE MILITAIRE  LIVRE VI ALGÉRIE et TUNISIE Pages suivantes
 - 108 -  Retour page Table des matières  - 109 -
   
   à la Kabylie. A peu de distance se trouve un grand pénitencier agricole. C'était un poste romain; et l'on voit, en effet, que cette position marque la liaison entre la vallée du Chélif d'une part, et la vallée de l'oued Sahel de l'autre.

Boghar (le balcon du désert), à 970 mètres environ au-dessus du niveau de la mer, et à 400 mètres au-dessus de la plaine, marque la limite de la zone tellienne dans la province d'Alger. Au-delà s'étendent les solitudes interdites à l'activité agricole européenne, mais productives encore, puisque l'alfa offre les mêmes richesses que dans la province d'Oran.

Boghar a été pendant longtemps regardé comme la limite à fixer à l'extension utile de l'action française; cette limite est bien dépassée, puisque l'on commence déjà à mettre en valeur des terres de culture sur les montagnes et dans les oasis sahariennes; mais, entre les montagnes du Tell et les chaînes sahariennes, il restera toujours une large zone intermédiaire; domaine des tribus pastorales, inhospitalière pour les colons. La prospérité, l'existence même de ces tribus, sont étroitement liées à l'abondance des pâturages; plusieurs années consécutives de sécheresse ont ruiné pour longtemps plusieurs d'entre elles. On ne trouve plus déjà les superbes chevaux qu'élevaient les Rahman Gharaba, les Oulad Moktar, etc.

Boghar (Castellum Mauritanum des Romains) était une des places d'Abd el-Kader ; il l'abandonna et la fit incendier en 1841, à l'approche de nos colonnes. Cette position a une grande importance militaire, parce qu'elle permet de garder la trouée du Chélif dans les montagnes du Tell, c'est-à-dire une des routes les plus fréquentées par les tribus. On y a construit une forte redoute, près de laquelle se sont groupées quelques maisons européennes.

Au pied de Boghar, le village européen de Boghari prend une rapide extension. Il s'y tient un marché hebdomadaire très fréquenté, où les tribus sahariennes font leurs échanges contre les produits du Tell.
Enfin, à quelques centaines de mètres de distance, accroché aux dernières pentes d'un petit plateau, le ksar arabe de

    

 

   

Boukhari a déjà une physionomie toute saharienne; et présente chaque nuit, jusqu'à une heure avancée, ce genre d'animation particulier aux villes du Sud, avec leurs musiciens nègres et leurs danseuses Oulad Nayl.

Au-delà commencent les steppes des Hauts-Plateaux. Ce sont d'abord des plaines rougeâtres, dépouillées de toute végétation, calcinées et craquelées par les feux du soleil, argileuses et imperméables aux eaux; de sorte que la moindre pluie transforme des kilomètres de route en bourbiers impraticables. Peu à peu le sol devient plus sablonneux et apparaissent quelques touffes de thym, de lavande, de salsolacées; puis enfin l'alfa, cette richesse naturelle de ces régions déshéritées.

L'aspect des Hauts-Plateaux est le même que dans la province d'Oran : solitude absolue, uniformité complète d'un sol horizontal à l'œil, mais très ondulé cependant et creusé de ravines nombreuses. De loin en loin une petite crête de pierrailles émerge de la plaine limoneuse; une bande de chameaux au pacage se profile singulièrement à l'horizon; une caravane se montre au loin, ne laissant pas même, comme le vaisseau, une trace de son sillage; quelques tentes noirâtres indiquent un campement de nomades.

La route, si l'on peut appeler ainsi une piste mal tracée sur le sol naturel, tantôt encombrée par les sables, tantôt emportée par une pluie d'orage, est jalonnée par des caravansérails, construits par les ordres du maréchal Randon après la prise de Laghouat, et qui marquent les points d'eau et les étapes des colonnes de troupe.

Entre Boghar et Djelfa, ce sont : Bou Ghezoul, el-Krachem, Aïn Oussera, Bou Cedraïa, Guelt es-Stel, el-Messerane, le.Rocher-de-Sel.
Dans l'origine, c'étaient aussi des postes militaires de surveillance et de ravitaillement; maintenant ce sont des hôtelleries et des relais. Quelques cultures les entourent, et l'on s'étonne de trouver dans plusieurs d'entre eux une propreté, un confortable même, qui permettent de traverser sans privations les 310 kil. de désert qui séparent Boghar de Laghouat.

 
Pages précédentes   Retour page Table des matières   Pages suivantes