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à la Kabylie. A peu de distance se trouve un grand pénitencier
agricole. C'était un poste romain; et l'on voit, en effet, que
cette position marque la liaison entre la vallée du Chélif d'une
part, et la vallée de l'oued Sahel de l'autre.
Boghar (le balcon du désert), à
970 mètres environ au-dessus du niveau de la mer, et à 400 mètres
au-dessus de la plaine, marque la limite de la zone tellienne dans
la province d'Alger. Au-delà s'étendent les solitudes interdites
à l'activité agricole européenne, mais productives encore,
puisque l'alfa offre les mêmes richesses que dans la province
d'Oran.
Boghar a été pendant longtemps regardé
comme la limite à fixer à l'extension utile de l'action
française; cette limite est bien dépassée, puisque l'on commence
déjà à mettre en valeur des terres de culture sur les montagnes
et dans les oasis sahariennes; mais, entre les montagnes du Tell et
les chaînes sahariennes, il restera toujours une large zone
intermédiaire; domaine des tribus pastorales, inhospitalière pour
les colons. La prospérité, l'existence même de ces tribus, sont
étroitement liées à l'abondance des pâturages; plusieurs années
consécutives de sécheresse ont ruiné pour longtemps plusieurs
d'entre elles. On ne trouve plus déjà les superbes chevaux
qu'élevaient les Rahman Gharaba, les Oulad Moktar, etc.
Boghar (Castellum Mauritanum des
Romains) était une des places d'Abd el-Kader ; il l'abandonna et la
fit incendier en 1841, à l'approche de nos colonnes. Cette position
a une grande importance militaire, parce qu'elle permet de garder la
trouée du Chélif dans les montagnes du Tell, c'est-à-dire une des
routes les plus fréquentées par les tribus. On y a construit une
forte redoute, près de laquelle se sont groupées quelques maisons
européennes.
Au pied de Boghar, le village européen
de Boghari prend une rapide extension. Il s'y tient un marché
hebdomadaire très fréquenté, où les tribus sahariennes font
leurs échanges contre les produits du Tell.
Enfin, à quelques centaines de mètres de distance, accroché aux
dernières pentes d'un petit plateau, le ksar arabe de
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Boukhari a déjà une physionomie toute saharienne; et présente
chaque nuit, jusqu'à une heure avancée, ce genre d'animation
particulier aux villes du Sud, avec leurs musiciens nègres et
leurs danseuses Oulad Nayl.
Au-delà commencent les steppes des Hauts-Plateaux. Ce sont d'abord
des plaines rougeâtres, dépouillées de toute végétation,
calcinées et craquelées par les feux du soleil, argileuses et
imperméables aux eaux; de sorte que la moindre pluie transforme
des kilomètres de route en bourbiers impraticables. Peu à peu le
sol devient plus sablonneux et apparaissent quelques touffes de
thym, de lavande, de salsolacées; puis enfin l'alfa, cette
richesse naturelle de ces régions déshéritées.
L'aspect des Hauts-Plateaux est le même que dans la province
d'Oran : solitude absolue, uniformité complète d'un sol
horizontal à l'œil, mais très ondulé cependant et creusé de
ravines nombreuses. De loin en loin une petite crête de
pierrailles émerge de la plaine limoneuse; une bande de chameaux
au pacage se profile singulièrement à l'horizon; une caravane se
montre au loin, ne laissant pas même, comme le vaisseau, une trace
de son sillage; quelques tentes noirâtres indiquent un campement
de nomades.
La route, si l'on peut appeler ainsi une piste mal tracée sur le
sol naturel, tantôt encombrée par les sables, tantôt emportée
par une pluie d'orage, est jalonnée par des caravansérails,
construits par les ordres du maréchal Randon après la prise de
Laghouat, et qui marquent les points d'eau et les étapes des
colonnes de troupe.
Entre Boghar et Djelfa, ce sont : Bou Ghezoul, el-Krachem, Aïn
Oussera, Bou Cedraïa, Guelt es-Stel, el-Messerane, le.Rocher-de-Sel.
Dans l'origine, c'étaient aussi des postes militaires de
surveillance et de ravitaillement; maintenant ce sont des
hôtelleries et des relais. Quelques cultures les entourent, et
l'on s'étonne de trouver dans plusieurs d'entre eux une propreté,
un confortable même, qui permettent de traverser sans privations
les 310 kil. de désert qui séparent Boghar de Laghouat. |
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