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   année, tous les deux ans, ou à intervalles plus éloignés, selon ses ressources, pour revoir sa famille.

Cet exode régulier d'une grande partie de la population mâle a des conséquences morales fâcheuses pour la partie féminine; de là, sans doute, la sévérité de la clôture imposée aux femmes.

Le Mzab était, en outre, un des marchés d'échange des Touareg et des grands nomades du Sud. La surveillance que nous exercerons sur le commerce des armes, l'interdiction du commerce des esclaves, la crainte d'entrer en contact avec nous, sont autant de causes qui arrêteront la venue des caravanes, quels que soient l'intérêt ou le désir que nous puissions avoir, au contraire, d'entretenir et de développer le mouvement commercial.

Au moment de notre conquête de l'Algérie, le Mzab avait à peu près le monopole du commerce du Soudan et du Sahara ; c'est là qu'arrivaient toutes les caravanes d'In Salah et la plupart de celles du Gourara et de Ghadamès.

L'abolition de la traite des nègres, proclamée en 1848, a eu pour conséquence d'éloigner les caravanes; comme elles amènent surtout des esclaves, elles vont maintenant sur les marchés où elles peuvent écouler leurs marchandises, c'est-à-dire vers la Tripolitaine et le Maroc; c'est à peine s'il en arrive quelques-unes, chaque année, au Mzab, où elles apportent des dépouilles d'autruches, quelques peaux de bêtes fauves, de l'ivoire, un peu de poudre d'or, des chameaux de course et des ânes sauvages du Hoggar 1.
En venant s'établir dans la Chebka, les Mzabites

1 Le Mzab et son annexion à la France, par le commandant Robin, chef du bureau arabe divisionnaire d'Alger. - Alger, Jourdan.

    

 

   

fuyaient, avons-nous dit, la persécution religieuse. Ce sont, en effet, des schismatiques, appartenant à une secte particulière. Les Arabes disent à la cinquième secte 1.

On a cru reconnaître une certaine analogie entre leurs mœurs religieuses et celles des Ouahabites, les puritains musulmans de l'Arabie. Ils n'est pas certain, cependant, qu'ils aient une origine commune ; cette hypothèse ne saurait être vérifiée que par des études comparatives qui restent à faire.

On a dit aussi que les Mzabites étaient de race berbère ; cette opinion n'a aucun fondement ; on est fort disposé, en Algérie, à considérer comme berbère tout ce qui n'est pas arabe. Enfin, l'on a supposé que, loin d'appartenir à une famille distincte, les Mzabites venaient de souches très diverses, qu'il n'existait entre eux aucun lien ethnique et seulement un lien religieux.

Ces questions d'origine sont toujours fort difficiles à élucider et assez stériles d'ailleurs.

Les habitudes sédentaires ont donné aux Mzabites un teint plus clair que celui des Arabes et des formes moins heurtées; la pratique du commerce a délié leur esprit ; le contact habituel avec les Français, l'antipathie dont ils sont l'objet de la part des Arabes, une tendance naturelle à utiliser nos procédés, prédispose les Mzabites, mieux que toute autre société indigène, à entrer dans le courant de notre civilisation et, peut-être, à s'en faire les agents.

Ce n'est pas sans regret, cependant, que la plupart d'entre eux, les tolba surtout, nous ont vus nous établir au Mzab, mais ils s'inclineront devant le fait accompli et chercheront à en

1 Les quatre sectes orthodoxes sont les Maleki, Hanefi, Ambeli, et Chafaï.

 
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