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   comme dans le Djebel-Amour, servir de comparaison. Mais, tandis que la caractéristique du Djebel-Amour est dans ses plateaux, ou Gada, élevés en terrasse et soutenus par des remparts verticaux, la caractéristique de l'Aurès est dans ses plis nombreux et serrés.

Ces deux massifs ne se ressemblent d'ailleurs ni au point de vue orogénique, ni au point de vue des productions du sol.

Dans certaines parties de l'Aurès, des étages de terrains d'une puissance considérable ont été entièrement emportés par les eaux. Ils ont été ensuite pétris, triturés et déposés en masse limoneuse ou en tufs calcaires dans les fonds de vallées qui ont été ainsi comblées, ou bien ils ont formé d'énormes bourrelets au pied méridional des montagnes.

L'action des eaux, à l'époque moderne, bien faible sans doute si on la compare à leur action prodigieuse dans les âges précédents, continue cependant à s'exercer d'une manière remarquable encore et modifie peu à peu les formes extérieures des terrains. Ici se creuse le lit d'un torrent entre des berges d'argile, ayant parfois de 20 à 30 mètres de hauteur. Là, des buttes d'une centaine de mètres, aux parois verticales, sont restées debout comme des témoins des puissantes dénivellations des siècles passés.

Les villages des Berbères sont accrochés à leurs flancs, et leurs sommets portent les guelaâ, c'est-à-dire les tours de sûreté qui servaient de magasins de réserve et de réduits en cas d'attaque. A leur pied, où ne coule plus maintenant, pendant la plus grande partie de l'année, qu'un mince ruisseau, sont les jardins et les cultures.

En ravinant leurs berges, les grands fleuves de l'époque ancienne en minaient les assises, et il est arrivé que les couches supérieures se sont effondrées ;

    

 

   

d'énormes morceaux de montagnes sont tombés dans les vallées, et leurs squelettes de pierre dessinent des digues, des murailles verticales , des promontoires d'un aspect très pittoresque. Les villages se sont bâtis sur les sommets de ces escarpements pour trouver de meilleures conditions de défense.

Il en a été ainsi dans tous les pays; les hommes n'ont osé habiter les vallées que lorsqu'ils ont eu moins à craindre le pillage et la destruction; et maintenant encore, insuffisamment rassurés sur leurs mutuelles dispositions, ils n'ont point perdu la coutume de fortifier les lieux élevés. Il y a donc une certaine ressemblance entre l'Aurès et la, Kabylie.

Les populations de l'Aurès sont de race berbère, avec mélange arabe; on les appelle des Chaouïa 1. On y trouve des types blonds que l'on a attribués, sans preuve d'ailleurs, à une infusion de sang germanique provenant des invasions des Vandales et des Goths.

Les femmes jouissent d'une grande liberté et travaillent au dehors comme les hommes. On a signalé la coutume de célébrer certaines fêtes dont les dates présentent la plus grande analogie avec les fêtes romaines, israélites ou chrétiennes, telles que Noël, le Jour de l'An, les fêtes du Printemps (Rogations), les fêtes de l'Automne.

La langue des Chaouïa de l'Aurès n'est point la même que le tomachek des Kabyles; leurs villages n'ont point l'aspect riant des villages kabyles, entourés de bosquets de verdure; au contraire, leurs maisons à terrasses, avec leurs murs en pisé ou crépis en mortier de terre

1 La signification de Chaouïa est: pasteur, berger nomade. Les Aurasiens sont cependant devenus sédentaires.

 
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