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dit 1, de quatre éléments bien distincts : les marabouts,
les chorfa 2, les djouad, les zenatza.
Les marabouts 3
viennent en général de l'ouest. Beaucoup ne sont autres que les
descendants des Almoravides, ces guerriers célèbres qui, vers le
milieu du XIème siècle, s'élançaient des rives du haut Sénégal
à la conquête du Maghreb el-Akça (l'Occident le plus éloigné),
où ils fondèrent la ville de Maroc. Ils s'emparèrent aussi, avant
de passer en Espagne, de la partie occidentale de l'Algérie.
(On donne également le nom de marabouts à certaines
individualités, remarquables par leur piété.)
Les chorfa sont les descendants de
la lignée du Prophète par sa fille Fatma, épouse d'Ali. Ces
chorfa sont nombreux dans tout l'ouest de l'Afrique. La famille
régnante du Maroc est d'origine chérifienne.
Les chorfa et les marabouts sont les
hommes qui, par leur influence religieuse, dirigent l'opinion
publique des masses indigènes. Plusieurs des agitateurs qui ont
fomenté, par leurs prédications, des insurrections en Algérie,
ont pris le titre de chérif sans en avoir certainement le droit par
leur origine.
Les djouad sont d'origine arabe.
Leurs hordes pillardes, traversant la Basse-Égypte, se sont d'abord
abattues sur la Tripolitaine et sur la Tunisie, puis sur
1 Situation
politique de l'Algérie, par Gourgeot, ex-interprète principal
de l'armée d'Afrique. Paris, Challamel, 9881.
2 Chérif, au pluriel Chorfa.
3 Le mot arabe merabet, dont nous avons fait marabout
et les Espagnols almoravide, en dénaturant la forme
plurielle el-merabtine, signifie assidu, lié; de là, hommes
liés à Dieu.
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l'Algérie, saccageant tout sur leur passage. Ils se sont créé un
rang prédominant, une sorte de noblesse basée sur la force de
leurs armes, comme celle des seigneurs du moyen âge. Leur
descendance en jouit encore ; c'est ce qui fait dire qu'ils sont de
noblesse militaire. Nous trouvons souvent chez eux; ou chez ceux
qui se donnent pour tels, de fort bons auxiliaires, lorsque l'on
peut les soustraire à l'influence des marabouts.
Les zenatza sont les descendants des anciens maîtres du
pays, qui ont survécu à toutes les invasions. Ils sont de race
berbère, et, en fait, beaucoup d'individus qui prétendent aux
trois autres castes sont eux-mêmes zenatza, c'est-à-dire
Berbères 1.
Le classement en Berbères et en Arabes que l'on aurait prétendu
faire d'après la langue, ne reposerait non plus sur aucune base
certaine. On trouve, en effet, des populations incontestablement de
race berbère, comme dans le cercle de Djidjelli, et qui parlent
exclusivement l'arabe.
Les déductions fournies par la comparaison des langues
1 Cette opinion, soutenue par un auteur dont l'autorité
est estimée, mérite d'appeler l'attention.
« Je le dis avec une profonde conviction, écrit M. Gourgeot, le
peuple d'Algérie n'est point celui qui, obéissant à la puissante
impulsion de Mahomet et de ses successeurs, sortit jadis des
déserts de l'Arabie pour s'élancer à la conquête du monde. Ce
n'est point ce peuple arabe qui, après avoir été l'effroi de
l'Europe, s'est énervé dans les grandeurs de la domination et les
mollesses de la vie sédentaire, puis s'est laissé morceler et a
fini par disparaître. Le peuple en présence duquel nous nous
trouvons, est ce peuple berbère tellement vivace, qu'il résiste
à tous les ravages, qu'il survit à tous les conquérants. Voilà
pourquoi, à deux mille ans de distance, nous l'avons retrouvé tel
qu'il apparut aux Romains dans la Numidie. Ce sont toujours les
mêmes cavaliers: maigres, basanés, nerveux, infatigables, et
intrépides. » |
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