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   ne peuvent d'ailleurs suffire pour éclairer les questions relatives aux origines ethniques des peuples. Des nations entières changent de langue et de religion. Les Bulgares, qui parlent une langue slave et ont adopté la formule religieuse des slaves, sont d'origine tartare.

Dans des provinces entières de la France, si profondément impressionnée par la langue et par la civilisation des Latins, le fond de la population est d'une filiation celtique ou germaine, mais elle l'ignore elle-même et s'en préoccupe peu.

L'histoire nous montre ainsi presque tous les peuples se formant des éléments les plus divers, de sorte que l'on peut dire qu'il n'existe pas de race absolument pure.

Au point de vue des conclusions pratiques à en tirer, cette recherche ethnique nous paraît d'ailleurs stérile et nous n'y insisterons pas. Peu importent les origines différentes des populations, si elles ont les mêmes mœurs, si elles sont réunies sous les mêmes lois, si les mêmes intérêts les préoccupent, et si les mêmes passions les agitent.

Mais, en Algérie, il n'y a pas identité de mœurs dans toute la population indigène. Une partie est sédentaire et cultive la terre; l'autre est nomade et vit des produits de ses troupeaux.

Leurs intérêts sont opposés, et, depuis l'origine du monde, l'histoire nous dit les luttes et l'antagonisme du pasteur et du laboureur.

C'est dans cette diversité de vie, qu'il faut rechercher surtout les caractéristiques des deux grandes fractions de la société indigène de l'Algérie.

Il n'en est pas moins certain qu'on y reconnaît deux races parfois juxtaposées, parfois mêlées ensemble et confondues.

    

 

   

Refoulés par les envahisseurs successifs, les Berbères se sont réfugiés dans les montagnes, et c'est là qu'on retrouve leurs tribus, à peu près pures de tout mélange, et parlant une ancienne langue pour laquelle ils n'ont pas de signes particuliers de transcription 1.

Le caractère principal de l'organisation kabyle est l'indépendance des tribus, mais des intérêts communs les amènent à se grouper momentanément et à constituer des ligues temporaires.

Les Berbères se trouvent dans le Djurdjura, dans les Babor, régions que l'on désigne sous le nom de Grande et Petite Kabylie, dans les massifs du Dahra, des Traras, de l'Ouarsenis, de l'Aurès, dans quelques oasis du Sahara. On rencontre parfois chez eux des hommes au teint clair, aux cheveux blonds et aux yeux bleus; mais le type dominant est brun, aux formes massives, à la tête carrée. Ils sont attachés â la terre, vivent dans des villages, cultivent le sol. Grâce à ces caractères généraux, on avait pensé pouvoir les amener plus facilement à nos mœurs; l'insurrection de 1871 a montré quels sentiments cette population nourrissait à notre égard; on n'a pas toutefois désespéré encore d'obtenir une certaine assimilation.

Les Kabyles du Djurdjura ont pu traverser la période de la domination turque sans être soumis. Ce

1 Convertis à l'islamisme, après avoir été chrétiens, ils sont assez indifférents on matière religieuse. Leurs femmes jouissent d'une grande liberté. Certaines coutumes bizarres, parfaitement incompatibles avec les préceptes du Coran, ont été conservées dans quelques tribus. C'est ainsi que, dans un village des montagnes à l'ouest de Bougie, l'étranger choisit à son gré, parmi les femmes, une compagne temporaire pour le temps de son séjour. Les coutumes imposent à son hôte, et, à défaut, à la djemmaâ, le soin de faciliter son choix.

 
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