Pages précédentes GÉOGRAPHIE MILITAIRE  LIVRE VI ALGÉRIE et TUNISIE Pages suivantes
 - 286 -  Retour page Table des matières  - 287 -
   
   soutenir longtemps; elle s'affaisse bientôt, et la fuite sera aussi rapide que l'attaque a été violente. Sous le nom de ksouriens, on entend les habitants des ksour ou villages du Sud. Soumis aux nomades, dont ils sont les serviteurs ou les vassaux, méprisés par eux, d'une autre race peut-être, vivant dans de misérables maisons sordides et en ruines, ils offrent trop souvent un affligeant spectacle de déchéance physique et morale.

« La base de l'organisation sociale des indigènes de l'Algérie est la tribu. La tribu, c'est ce que l'Arabe peut comprendre, comme collectivité, avec son sens étroit des intérêts économiques. C'est ce qui peut se grouper facilement au jour du danger et marcher sous la direction d'un seul 1. » C'est une réunion de 100 à 500 tentes, et l'on compte en moyenne 4 ou 5 individus par tente.

Au delà de ce chiffre, la tribu se fractionne. Les grandes tribus sont en réalité des confédérations, et les luttes sont fréquentes entre leurs fractions.

L'éternel dualisme de toute société, le pour et le contre, s'incarnent généralement en deux familles qui représentent deux sofs, c'est-à-dire les deux partis entre lesquels la tribu se divise.

Le pouvoir échoit tantôt à l'un, tantôt l'autre. Ce dualisme maintient la vie, la tension nerveuse dans ces républiques en miniature.

Dans le Sahara, comme dans presque tous les ksour du Sud, les deux partis rivaux prennent le nom de sof chergui et de sof gharbi, le parti de l'est et le parti de l'ouest.

1 Colonel Noëllat, loc. cit.

    

 

   

Dans les misérables bourgades des ksouriens, une rue, large seulement d'un ou de deux mètres, sépare parfois des ennemis acharnés, qui se livrent de sanglants combats.

Les nomades se partagent de même en campements rivaux qui en viennent fréquemment aux mains.

On a dit que les dénominations de sofs de l'est et de l'ouest rappellent les anciennes luttes entre les envahisseurs venant de l'Orient et les populations déjà fixées dans le pays. Si cette hypothèse est vraie, ces noms ont toutefois perdu toute signification de cette nature.

C'est sur ces luttes intestines constantes que les anciens maîtres du pays, Carthaginois, Romains, Turcs, avaient basé leur politique. Loin de se proposer une pacification impossible, ils se bornaient, suivant leurs intérêts, à favoriser tantôt les uns, tantôt les autres.

Quelques milliers de soldats leur suffisaient pour faire pencher la balance en faveur de leurs protégés du moment.

Cependant, dans les régions où la population est sédentaire, l'organisation sociale est plus complète, mieux fixée; la famille est mieux constituée, la propriété mieux comprise.

A la tête de la tribu est le caïd, qui réunit à peu près tous les pouvoirs. Il est le chef politique, le représentant responsable de l'autorité française. Il est le chef militaire et commande les goums lorsqu'ils doivent marcher. Il est enfin le collecteur des impôts et il est assisté par le cadi, chargé de rendre la justice.

Cette institution du caïd est commode, parce qu'elle met entre le commandement et la tribu un intermédiaire responsable; mais elle est dangereuse également, parce

 
Pages précédentes   Retour page Table des matières   Pages suivantes