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que l'autorité des caïds échappe facilement au contrôle du
commandement et qu'ils peuvent commettre des exactions qui sont
souvent une des causes des insurrections, comme, par exemple, dans
l'Aurès, en 1879.
L'organisation de la tribu a aussi ses
avantages, parce qu'elle met en face du commandement une
collectivité plus facile à manier, une responsabilité plus facile
à saisir que s'il fallait poursuivre les individus; mais elle a ses
inconvénients, parce qu'elle maintient la solidarité et la
cohésion entre des hommes toujours prêts à se révolter.
Il est impossible de modifier cet état
de choses dans les populations nomades; mais partout où la
population se fixe au sol, lorsqu'elle entre en contact avec la
colonisation européenne et qu'elle devient plus saisissable, il y a
toujours intérêt à désagréger la tribu en rattachant l'Arabe,
comme individu et non plus comme collectivité, à la commune
européenne.
La tribu se décompose en douars, formés
de la réunion d'un certain nombre de tentes, de 10 à 30 environ,
sous le commandement d'un chef de douar.
C'est par l'intermédiaire de ces chefs
que s'exerce l'autorité française, représentée, en territoire
civil, par les administrateurs, et, en territoire militaire, par les
officiers chefs des bureaux arabes, qui centralisent tout ce qui
concerne l'administration; mais l'autorité des bureaux arabes est
plus grande que celle des administrateurs; ils commandent en même
temps qu'ils administrent, et ils exercent des pouvoirs
disciplinaires plus étendus 1.
La discipline imposée aux tribus, et
d'accord d'ailleurs
1 Voir
l'arrêté du 14 novembre 1864 (Bulletin du Gouvernement général
de l'Algérie).
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avec leurs habitudes traditionnelles, est fort étroite. Les
parcours et les campements leur sont assignés d'une manière
précise, et il n'est permis ni à une tente de s'écarter du
douar, ni à un individu de quitter sa tente, sans autorisation
préalable.
Ce serait d'ailleurs une erreur de croire que les chefs arabes ont
toujours, par eux-mêmes, une influence considérable sur leurs
administrés. Ils n'ont, au contraire, souvent, que celle que nous
leur attribuons et qu'il est, par conséquent, prudent de ne pas
exagérer. Quelques familles sont, il est vrai, en possession d'une
certaine autorité héréditaire et l'on est obligé de compter
avec elles; aussi était-il naturel que l'on s'efforçât de
diminuer leur prestige, afin de les mettre hors d'état d'en tirer
parti contre nous dans un moment de crise.
Ce résultat a été obtenu, peu à peu, dans la majeure partie du
Tell; la tranquillité s'affermissant, les chefs militaires ont vu
leur rôle s'amoindrir et les brillants cavaliers de l'époque de
la conquête ont des enfants qui ne peuvent s'occuper que de faire
valoir leurs domaines. Incapables de lutter contre la colonisation,
ils se résignent plus ou moins et quelques-uns bornent leur
ambition à briguer les situations qui leur donnent accès dans les
conseils généraux.
Dans le Tell, les titres d'aga , de bach-aga, de caïd des caïds,
ne sont donc plus que des distinctions honorifiques rappelant
l'autorité dont étaient investis les anciens chefs des grandes
tribus.
La diversité des sentiments et des habitudes de la population
indigène n'est pas moins frappante que la diversité de la
configuration de son sol. Il n'y a pas plus de ressemblance entre
les habitants de la Kabylie, |
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