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   de s'apaiser, augmentent d'année en année, et qui ne font que guetter l'occasion de nous chasser de la terre d'Afrique. Dans ce concert, les indigènes algériens se font peut-être moins entendre, mais il ne sont peut-être pas les moins dangereux. »

« Passionné et fanatique, le peuple arabe peut céder d'un moment à l'autre aux excitations religieuses de quelque prophète de passage, et nous saurions d'autant moins désarmer que la colonisation, avec une confiance exagérée, s'éparpille à tous les vents; qu'elle se dissémine en s'écartant à grande distance des postes militairement occupés; qu'elle devient partout vulnérable, et qu'elle est impuissante à se protéger elle-même. Il est sage de prévoir qu'une grande guerre continentale peut devenir le signal d'une révolte arabe. »

Il serait possible cependant de réduire l'effectif des troupes permanentes d'Algérie en développant la construction des chemins de fer militaires. Au point de vue du développement économique de l'Algérie, il est certainement utile de terminer le plus promptement possible le réseau du Tell; mais, au point de vue de l'occupation militaire, il est non moins indispensable de construire des lignes qui permettent de traverser les Hauts-Plateaux et de conduire rapidement les troupes et leurs approvisionnements sur notre frontière du sud, d'où partent le plus fréquemment les excitations religieuses.

L'achèvement des lignes d'Oran à Aïn Sefra, d'Alger à Laghouat, de Constantine à Biskra et, si l'on peut, à Tougourt, de Bône à Tebessa facilitera singulièrement le rôle de surveillance des postes du sud.

Une compagnie suffira où l'on était obligé de maintenir un bataillon. Le Tell restera notre base d'opérations, et l'on n'aura à conserver sur la frontière saharienne que des postes de vigie.

    

 

   

Les lignes perpendiculaires à la côte ou lignes d'attaque doivent être reliées entre elles par des lignes de manœuvre, c'est-à-dire :

par la ligne du Tell : Tlemcen-Oran-Alger--Constantine-Soukarras-Tunis, actuellement achevée;

et par une ligne saharienne, soit au nord, soit au sud de la chaîne saharienne, partant des oasis des ksour et se dirigeant par Laghouat sur Biskra; de Biskra sur Gafsa et Gabès ; cette ligne est à construire.

La distance à vol d'oiseau de Biskra à el-Abiod Sidi Cheikh est exactement celle de Bordeaux à Marseille, et l'on ne rencontrerait point de difficultés de construction.
La distance de Gabès aux oasis de Figuig, sur la frontière du Maroc, serait double.

Cette entreprise n'est donc pas hors de proportion avec le résultat à atteindre. L'expérience prouve que la protection d'une ligne ferrée en pays arabe est relativement facile. Des stations fortifiées défieront toute attaque de la part des nomades; des communications par télégraphe électrique ou par télégraphe optique avertiront facilement les postes mobiles de se porter sur les points où leur présence deviendrait nécessaire. Au besoin, dans les périodes d'insurrection, on peut faire escorter les trains, et, quant aux dégâts que les Arabes pourront occasionner à la voie avec les engins dont ils disposent, ils seront toujours de peu d'importance et rapidement réparables. L'établissement d'une ligne, parallèle aux limites sahariennes, permettrait, d'établir une zone de protection militaire qui serait une sorte de Marche du Sud de l'Algérie analogue à celles dont Charlemagne avait bordé son empire.

Les Romains ont procédé ainsi dans leurs conquêtes, faisant servir à leur politique les peuples mêmes que

 
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