|
de science, et de piété. On les a considérés comme les élus de
Dieu, désignés par lui pour diriger les autres hommes,
intermédiaires de ses faveurs, ayant le privilège de ses
bénédictions. On les honore, on vénère leurs tombeaux, on les
prie d'intercéder pour obtenir des grâces ; mais on croit en outre
que leur descendance hérite de la bénédiction céleste, de la baraka,
et c'est ainsi que certaines familles jouissent d'une influence
religieuse considérable qui leur donne une grande autorité. Ce
sont les familles de marabouts.
Les marabouts sont fort nombreux en
Algérie. Quelques-uns, dont les ancêtres avaient une grande
réputation de sainteté, ont groupé autour d'eux un chiffre
considérable de fidèles ou serviteurs religieux. Ceux-ci se
mettent sous la protection spirituelle du saint, observent certaines
pratiques particulières, portent quelquefois un chapelet qui est un
signe de reconnaissance, obéissent avec dévouement aux chefs, qui
sont les héritiers de la baraka.
Ces associations ne sont point des
sectes, bien que chacune ait son rituel spécial; elles ne sont ni
ennemies, ni divisées au point de vue du dogme, bien qu'elles se
jalousent mutuellement.
Les adeptes, ou khouan, reçoivent
un chapelet et une formule de prière djirk; ils payent une
redevance sous forme d'aumône, ou ziara, aux mokaddem,
qui chaque année parcourent les tribus. Ces redevances accroissent
les richesses de la confrérie, mais elles sont, généreusement
aussi, employées en bonnes oeuvres. On peut être affilié à
plusieurs ordres. Entrer dans un ordre religieux, se dit prendre la
rose (ourd).
Le centre religieux de ces confréries
est la zaouïa.
|
|
|
|
« La zaouïa ¹ est à la fois une
chapelle qui sert de lieu de sépulture à la famille qui a fondé
l'établissement, et où tous ses serviteurs religieux viennent en pèlerinage
; c'est un lieu de prière, souvent une école, un centre
littéraire. C'était aussi un lieu d'asile, et c'est toujours une
maison hospitalière, où les voyageurs, les pèlerins, les malades,
les infirmes, et les incurables trouvent un gîte, des secours, des
vêtements, de la nourriture ; c'est aussi un bureau d'esprit
public, où s'échangent les nouvelles, où l'on écrit l'histoire
des temps présents; enfin, une bibliothèque qui s'accroît tous
les jours par les travaux des hommes qui y sont attachés et où
l'on conserve la tradition écrite des faits passés. » Mais c'est
surtout un foyer de propagande religieuse dont le rayonnement
s'étend au loin. Un chef avec le titre
de cheikh, quand il appartient à la famille propriétaire de
la zaouïa, avec le titre de mokaddem (gardien) ou d'oukil
(fondé de pouvoir), quand il est étranger à cette famille, dirige
l'établissement. De nombreux serviteurs (khoddam) sont
attachés à chaque zaouïa, soit pour cultiver les terres qui en
dépendent, soit pour assister le nombreux personnel d'écoliers, de
marabouts, d'infirmes, et de voyageurs fréquentant
l'établissement. Une zaouïa est
quelquefois un village de vingt à trente maisons, comme celle de
Moulaï Taïeb, chez les Traras ; quelquefois un bourg
considérable; composé d'une centaine de maisons, cabanes ou
tentes, comme la zaouïa de Sidi Mahi ed-Din sur l'oued el-Hammam ;
d'autres fois une réunion plus ou moins considérable de tentes,
comme la zaouïa de Sidi Mohamed ben Aïssa, ¹
De Neveu, Les Khouan. |
|