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   chez les Flittas. Toujours, il y a dans la zaouïa un lieu d'assemblée, de réunion ou de prière, une mosquée.

Les zaouïas avaient autrefois de nombreux biens (habbou), provenant de donations, dont les revenus leur étaient acquis, mais qu'elles ne pouvaient vendre, véritables biens de mainmorte. L'administration française a procédé, en Algérie, comme on l'a fait en France en 1790. Elle s'est approprié ces biens, mais à charge de pourvoir aux dépenses des zaouïas et du culte, engagement qui n'a pas été partout respecté. Cette mesure a été considérée comme la pire des spoliations, et le mécontentement qu'elle a provoqué en Algérie est comparable à celui que les mesures de même nature ont provoqué en France dans la société religieuse ¹.

On comprend que les dispositions personnelles des chefs religieux intéressent au plus haut point la sécurité de l'Algérie. L'expérience prouve que toutes les révoltes sont fomentées par des prédications religieuses,

¹ Il existe une certaine analogie entre l'organisation des confréries musulmanes et celle des ordres religieux du christianisme. Dominicains, Franciscains, Jésuites, Bénédictins, etc. sont certainement des catholiques orthodoxes, mais ils suivent cependant une règle religieuse spéciale à leur ordre et leur orthodoxie commune n'exclut pas une certaine rivalité dans leurs intérêts temporels et dans leurs propagandes religieuses. Chacun de ces ordres groupe ses institutions en province sous l'autorité d'un provincial et reconnaît l'autorité supérieure d'un général. Il en est à peu près de même des confréries musulmanes.

Des zaouïas de différentes sectes se trouvent parfois rapprochées, absolument comme des maisons de jésuites ou de dominicains dans nos villes; mais il arrive aussi que tel ordre est prépondérant dans une région. Les Tedjâna dominent en Tunisie et dans la province de Constantine; les khouan de Moulaï Taïeb au Maroc et dans la province d'Oran ; les Senousiâ en Tripolitaine. Il en est de même dans nos sociétés chrétiennes où, par exemple, les franciscains sont plus nombreux en Autriche, les lazaristes, en France, etc.

    

 

   

et si certains marabouts sont animés de sentiments hostiles, des tribus entières, ordinairement fort paisibles, ne donnant aucune inquiétude, heureuses et bien administrées, peuvent faire inopinément défection pour suivre le marabout dont elles sont les serviteurs religieux. L'influence favorable d'un marabout peut, au contraire, utilement s'exercer pour maintenir dans le devoir des fractions prêtes à s'insurger.

Cette impressionnabilité des tribus est particulièrement vive chez les nomades du Sud, que l'influence française pénètre peu et qui ont de grandes facilités pour s'échapper et mettre hors d'atteinte leurs richesses, c'est-à-dire leurs tentes et leurs troupeaux.

Les Arabes ne pouvant se passer de marabouts, on ne saurait tenter de les supprimer pour supprimer leur influence; il est donc utile au contraire de les ménager, de les tenir dans la main, d'opposer les uns aux autres, et de grandir ceux-ci pour diminuer l'importance de ceux-là. Cette question d'équilibre religieux est fort délicate; elle réclame un grand tact et une attention suivie.

Parmi les doctrines, qui sont la base de l'islam, une des plus importantes est celle de l'imamât, qui établit la suprématie du pouvoir spirituel ou religieux sur le pouvoir temporel, de telle sorte que, sans réputation de sainteté, aucun chef ne pourra acquérir un pouvoir efficace et durable dans la société musulmane.

L'imâmat est la perpétuité du gouvernement religieux de Mahomet, représenté par des hommes avec lesquels le Prophète reste toujours en communication.
L'iman est un saint.

Pour les musulmans fidèles, le pouvoir temporel n'a aucun prestige; il doit toujours être soumis au contrôle

 
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