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   religieux. Cette doctrine était aussi celle des chrétiens aux époques de ferveur religieuse; elle limitait alors heureusement le pouvoir tyrannique et absolu que les chefs de nation étaient trop facilement tentés de s'arroger en s'appuyant sur la loi du plus fort. Elle était une garantie de justice et de liberté pour le plus faible, qu'elle protégeait, dans une certaine mesure, contre les abus de la force ; mais elle donnait elle-même naissance à d'autres abus en mettant les chefs religieux au-dessus de tout contrôle et en substituant un absolutisme à un autre.

C'est ainsi que les khouan d'une confrérie doivent être " entre les mains du cheikh, comme le cadavre entre les mains du laveur des morts ; " sicut ac cadaver, disent aussi les règles de certains ordres chrétiens.

Les ordres religieux sont nombreux dans le monde musulman ¹ et la plupart ont des adeptes en Algérie. Nous devons nous borner à donner quelques indications sur les plus importants d'entre eux.

Ordre des Seddikya. - Cet ordre est le plus ancien, puisqu'il a été fondé par Abou Beker (el-Seddik, le certificateur) père d'Aïcha (la Vierge) femme de Mahomet. Ce sont ses préceptes qui se retrouvent comme base des doctrines de tous les autres.

Ordre des Chadelya. - Fondé en 1258 au Maroc. Il dérive de l'ordre des Madanya, fondé par Sidi bon Midian, né à Séville en 1126, qui importa dans l'ouest les doctrines du soufisme, c'est-à-dire la recherche d'un état de sainteté par la vie mystique et les pratiques pieuse.
El-Chadely, né près de Ceuta, en 1196, a donné pour précepte : " Obéis à ton cheikh avant d'obéir au souverain temporel ". Le centre principal d'action de cet ordre est en Tripolitaine. Ses doctrines ont été accentuées par el-Derkaoui.

¹ Une étude détaillée de l'organisation des confréries religieuses de l'Algérie a été faite par le commandant Rinn : Marabouts et Khouans, Étude sur l'islam en Algérie. Voir également Note sur la religion musulmane en Algérie, par Kiva, Spectateur militaire, 1886.

    

 

   

Ordre des Derkaoua. - Fondé en 1823 au Maroc. Le chef de l'ordre est le chérif de Madaghra, frère d'un prétendant au trône du Maroc. Sa résidence est à une journée de marche de Tafilalet. Pendant les troubles de 1881, les tribus du Sahara marocain l'avaient reconnu pour chef et avaient secoué l'autorité de l'empereur du Maroc. C'est ainsi qu'elles prêtèrent momentanément assistance contre nous aux Oulad Sidi Cheikh et à Bou Amama.

Les Derkaoua sont une sorte d'ordre mendiant; ils comptent de nombreux adeptes dans le Sud-Oranais et ont pour centre principal les montagnes de l'Ouarsenis; ils ont pour doctrine de refuser l'obéissance à toute puissance temporelle, Dieu étant le seul maître; aussi, du temps des Turcs, le nom de derkaoua était-il synonyme de révolté. Ils ont été les instigateurs les plus dangereux du fanatisme musulman contre notre occupation. Les fidèles ne doivent séjourner dans les villes qu'en cas de nécessité absolue, ou pour accomplir quelque acte de piété. Ils doivent peu parler, peu manger, peu dormir, marcher à pied dans le désert, etc.

En 1845, une bande de Derkaoua pénétrant, en mendiants, clans le fort de Sidi bel Abbès, tenta de l'enlever par surprise. On peut, en quelque sorte, les considérer comme les précurseurs ou les initiateurs du senousisme, bien que beaucoup de leurs khouan paraissent réellement inoffensifs.

Un grand nombre de confréries marocaines dérivent des Derkaoua. Parmi les plus exaltés sont les Aïssaoua.

Ordre de Sidi Mohammed ben Aïssa. Fondé en 1525, à Meknès, dans le Maroc. Cet ordre est peu répandu en Algérie; il y a cependant une zaouïa importante au nord de Tagdemt, chez les Flittas. On trouve beaucoup d'Aïssaoua au Maroc; ses khouan sont connus par les pratiques

 
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