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La garnison était dans une pénible attente du résultat, quand le 6 avril, tout-à-fait en dehors de la correspondance ordinaire, le bateau à vapeur le Brasier, est signalé. On en voit successivement sortir M. Lowasi et M. le colonel du génie Lemercier. Le public apprend bientôt que cet officier-supérieur venait pour reprendre une négociation entamée, disait-on, avec Oulid-ou-Rabah, et la conduire à terme dans le plus bref délai et à tout prix.

L'entrevue avec le chef kabaïle eut lieu le 8, sur cette même rive de la Summam. Persistant dans ses motifs de rancune d'avoir été dédaigné par le commandant-supérieur de Bougie, dans le but de taire alliance avec d'autres tribus, ou plutôt ayant reçu sa leçon et s'y tenant, Oulid-ou-Rabah articula un refus positif de traiter avec M. Duvivier. Le colonel Lemercier insista sur ce point à plu sieurs reprises, témoignant au chef kabaïle la haute estime du gouverneur-général pour cet officier, et le désir positivement exprimé par le premier de voir Oulid-ou-Rabah changer de résolution. Ce lui-ci persista dans ses vagues raisons de refus, ou plutôt n'en donna aucune. Instruit de ces dispositions de l'ennemi, qu'il avait jusque-là si loyalement combattu et toujours avec succès, et à la rigueur pouvant voir dans ce refus un motif très-honorable pour lui, le lieutenant-colonel Duvivier, voulant éviter d'être un obstacle à ces négociations, formula dans les termes les plus précis, à M. le comte d'Erlon, gouverneur, sa demande de rappel de commandant supérieur de Bougie. Cette pièce partit avec le bateau à vapeur le 8, à minuit. Le 11, à deux heures, le même bâtiment rentrait au port ; on apprit de suite que M. Lemercier était commandant titulaire.

Les négociations reprirent alors leur activité, conduites exclusivement par cet officier-supérieur. Une autre entrevue eut lieu a l'embouchure de la rivière, sur le même terrain que le 27, non sans de grands risques, même à cause du mouvement des vagues qui faillirent engloutir, à diverses reprises, le diplomate français et les gens de sa suite.

    

 

   
Profitant de la crainte que nos armes, depuis les dernières rencontres, avaient imprimée aux tribus, le dessein de M. Duvivier était de les forcer toutes à composition, mais en faisant entrer le temps comme élément indispensable dans une pacification aussi difficile. Les circonstances n'ont pas permis d'admettre ce délai ; il s'est agi d'obtenir sans retard, et à tout prix, une forme de traité avec le chef supposé le plus influent de la vallée de Messaoud, pour répondre sur-le-champ aux exigences des chambres, dans le but de restreindre l'occupation de Bougie et par suite, la défense ; ou en admettant l'abandon prochain, d'y procéder sans trop d'obstacles ni de dangers. Voici, au demeurant, ce qui fut appelé un traité de paix. La suite, loin de sanctionner les résultats et les mesures adoptées, n'a que trop justifié les prévisions de M. Duvivier, niant l'influence d'Oulid-ou-Rabah, pour conduire à terme la pacification désirée.
 
 
TRAITÉ DE PAIX
 
Entre Son Excellence le Gouverneur-Général d'Alger et de ses dépendances, et l'honoré, le vertueux scheik Sâad-Oulid-ou-Rabah.
 
Le colonel du génie Lemercier, directeur des fortifications, porteur de pleins pouvoirs du gouverneur-général, et le scheik Sâad-Oulid-ou-Rabah, sont convenus de ce qui suit :

Art. 1er. - A dater du jour de la signature du présent traité, toute hostilité cessera entre les Français et les tribus kabaïles (le nom de ces tribus manque dans la pièce que j'ai sous les yeux, présomption déjà bien forte qu'Oulid-ou-Rabah n'osait s'engager ou était de mauvaise foi) qui obéissent au scheik Oulid-ou-Rabah. Les deux parties contractantes s'obligent à maintenir, par tout ce qui est en leur pouvoir, la paix la plus durable sur ce pays, trop longtemps teint du sang des chrétiens et des musulmans.

 
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