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Art. 2. - Les troupes françaises
continueront à occuper Bougie, tous ses forts, tous ses
postes extérieurs, ainsi que tout le territoire qui dépend
de la ville et qui comprend toute la plaine jusqu'à l'Oued-bou-Messaoud
(rivière Summam). Cette partie de la plaine contient des
marais malfaisants, qu'il faut absolument dessécher pour le
bien de tous, et qu'on ne peut écouler que dans la grande
rivière dont s'agit.
ART. 3.- Le gouvernement français, pour prouver combien il
est confiant dans les dispositions pacifiques des tribus du
scheik Sâad-Oulid-ou-Rabah déclare que tous les musulmans
des tribus amies qui voudront habiter la ville de Bougie
pourront s'y établir en toute sûreté. Leur religion sera
protégée et respectée.
ART. 4. - Les Kabaïles, et en général tous les
musulmans, pourront entrer et circuler librement dans la
ville. Les marchés leur seront ouverts, et protection leur
sera donnée pour la vente des denrées, des bestiaux et de
tout ce qu'ils apporteront.
ART. 5.- Le consul-négociant désigné par le scheik Sâad,
autorisé par le gouverneur-général, résidera à Bougie. II
sera chargé de régler avec l'autorité française toutes les
discussions commerciales des Kabaïles avec les sujets du
gouvernement français, et en général avec tous les
Européens.
ART. 6.- Le présent traité sera éxécuté de suite, en
vertu des pleins pouvoirs dont M. le colonel du génie
Lemercier est porteur. Ce traité sera cependant envoyé au
gouverneur-général, pour être ratifié par lui.
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Fait en double expédition, à
Bougie, le 9 avril 1835. |
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ARTICLE SUPPLÉMENTAIRE. - Si
quelques tribus récalcitrantes continuent à faire la guerre,
le scheik Oulid-ou-Rabah s'engage à se joindre aux Français
pour les soumettre, et réciproquement. |
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Examinons rapidement comment le
traité a été exécuté, et ce qui en est réellement
résulté. Le 24 avril, douze jours à peine après les
accords passés, les Beni-Aidek, tribu éloignée, mais de la
vallée même du Messaoud, se présentent hostiles devant
Bougie, et tiraillent toute la journée contre les ouvrages.
Oulid-ou-Rabah, contrairement à l'article supplémentaire du
traité, ne parait point. Notre confiance presque ingénue
jusqu'au ridicule sur sa coopération et sa présence sur les
derrières de l'ennemi, se prolonge jusqu'au soir, et entache
même d'une faiblesse marquée la sortie faite enfin par la
garnison contre ces agresseurs inattendus. Oulid-ou-Rabah a
donné passage aux provocateurs au retour de l'expédition. Il
dit bien qu'il leur a pris leurs chevaux et leurs armes ; mais
il ajoute qu'il les leur a rendus à la prière des grands et
des marabouts. Deux jours après, le dimanche 26, trois
soldats, descendus sans armes du Gouraya sur la plage en
arrière du fort, au nord, sont assassinés et horriblement
mutilés par les Mezaya ; il est vrai que cette tribu est
opposée à la paix et proteste ainsi à sa manière contre la
transaction du 9 avril. Prenant goût aux cadeaux reçus, à
l'argent touché (3,000 francs ), Oulid-ou-Rabah, dans une
correspondance suivie, incessante, avec M. Lemercier, plus
tard avec M. Girod, revient volontiers sur cet article ; mais
il élude la vraie solution de la question, l'ouverture du
marché de Bougie, idée que caressait beaucoup M. Lemercier.
Toute cette correspondance révèle cupidité d'abord, surtout
insuffisance de pouvoir, ensuite duplicité et projet bien
arrêté de compromettre les Français à l'égard des
Beni-Mimoun et des Mezaya, rivaux déclarés d'Oulid-ou-Rabah,
et d'exploiter habilement notre intervention contre ces
tribus. Voici les principaux passages de cette correspondance
:
Du 21 avril 1835. -- " Je rétablirai la paix, la
concorde et la tranquillité dans les tribus, et par sa faveur
et sa grâce, Dieu opérera une réconciliation générale....
Je ne le ferai pas mentir (Médani). Je suis avec vous. Nous
avons vu beaucoup de monde au sujet de la paix, et il n'existe
bientôt plus rien entre nous qui puisse être contraire à
nos intérêts et à ce qui a été conclu...
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