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contreforts à droite, formant la
gauche de la position des avant-postes de Darnassar. Le
bataillon, après avoir exécuté avec un grand calme des feux
de chaussée pour arrêter l'ennemi, et prendre le temps de
dégager et rallier ses détachements, s'achemine vers la
hauteur indiquée. L'obusier attaché à cette colonne y
était déjà rendu et entrait en action. Un deuxième obusier
conduit de la droite par le chef d'escadron d'artillerie en
personne, s'était porté rapidement sur l'étage inférieur
du contrefort de gauche, et soutenu bientôt par une section
du 2e bataillon, put bien garder sa position, qui se trouvait
précisément prendre l'ennemi en flanc.
Arrivé au lieu indiqué, le 2e bataillon s'y était massé
en colonne serrée par peloton, et là, à l'abri des coups de
fusils, formait barrière aux cavaliers kabaïles. A sa
droite, était une réserve postée dans une masure ruinée
qui soutenait en même temps le premier obusier. Le deuxième,
grâce à sa position avancée sur l'étage inférieur, se
trouvait flanquer juste notre arrière-garde. Celle-ci
commandée par le capitaine Nipert, secondé des lieutenants
Bucheron et Magnen et du sergent-major des sapeurs Loisy,
était alors vivement pressée, attaquée corps à corps,
saisie par les vêtements et les gibernes par une nuée de
Kabaïles, cavaliers et fantassins, poussant des hurlements
affreux. Au loin s'entendaient des voix de femmes les excitant
au combat ; tandis que d'autres Arabes non armés, mais
prenant part à l'action et poussant les mêmes hurlements,
faisaient pleuvoir sur les rangs du deuxième bataillon
placés à leur vue une grêle de pierres. Une musique barbare
de cornemuses augmentait le caractère sauvage de celte
attaque frénétique. C'était une mêlée de Sarrazins au
moyen-âge, extraordinaire par sa nouveauté et ses bizarres
circonstances.
Cependant les assaillants poursuivaient leur marche avec la
plus grande détermination, prenant la retraite sage et
calculée du 2e bataillon léger pour un abandon réel du
champ de bataille. Les cavaliers poussant leurs chevaux et
gravissant l'escarpement,
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faisaient reluire leurs yatagans
presque au dos des pelotons d'arrière-garde du capitaine
Nipert, et avec de tels forcenés la moindre hésitation eût
pu entraîner une défaite. Le moment paraissait donc
opportun, la distance voulue, la position excellente au
deuxième obusier pour agir avec de la mitraille. L'effet des
premiers coups sur les cavaliers ennemis qui se présentaient
exactement à cette décharge suivant la longueur de leurs
chevaux, fut radical ; ils s'arrêtent court ; les pelotons
d'arrière-garde font alors face en arrière et par un
mouvement électrique, se précipitent en avant sur les
Kabyles, baïonnette croisée. Ceux-ci sont poussés avec la
plus grande vigueur jusqu'aux ravins inférieurs. L'artillerie
poursuit ses effets, décisifs, tant que les Kabyles sont à
portée de la mitraille ; les obus et les balles de rem part,
combinés avec les feux des tirailleurs du 2e bataillon,
continuent et font le reste, jusqu'à ce que les Arabes,
entièrement en désordre, se soient portés hors de distance.
Rebutés sur ce point, et ne voyant nulle possibilité
d'entamer la ligne d'aucun côté, grâce aux dispositions
prises par le capitaine chef du génie à Démous, où les
travailleurs avaient volé aux armes, à la présence de nos
58 chasseurs qui, en bataille sur un rang au bas des travaux,
les protégeaient, à l'ordre qui régnait aussi sur loin le
reste de la ligne de défense, les Kabyles, longtemps errants
et déconcertés, commencèrent à la fin leur retraite, que
vint accélérer une pluie qui tomba dans la soirée. Tout
disparut hors quelques piquets éloignés attendant notre
départ de la position pour en lever les morts et les
blessés, que leur défaite du matin les avaient forcés de
laisser. Le nombre s'en élevait au moins à 150, et chose
incroyable après un combat aussi acharné, nous n'eûmes que
deux tués et neuf blessés.
Le temps continuant à être mauvais le 12, la journée fut
consacrée au repos ; du 13 au 19, les Kabyles découragés
par leurs pertes surtout dans les actions des 10 et 11, n'ont
paru qu'isolément et en petit nombre. Ces pertes, du propre
aveu de l'ennemi, dans les cinq affaires, étaient de 100
hommes tués et
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