Pages précédentes LA GRANDE KABYLIE   NOTE D Pages suivantes
  Retour page Table des matières 450
   
  
200 blessés ; les nôtres se bornaient à 13 hommes morts et 33 blessés. Ce calme a permis de pousser les travaux de Démous avec la plus grande activité : outre la restauration complète où l'on trouve le logement de l'officier ; au-dessus, un premier étage de blokaus; dans le bas, le magasin à poudre et une citerne; le fort Clausel, de forme bastionnée et en maçonnerie, a un pourtour de 210 mètres ; il peut réunir en tout 100 défenseurs avec tous les accessoires qui constituent un casernement complet. Armé de l'artillerie suffisante et approvisionné de suite, ce fort a pu prendre, à l'instant, dans le nouveau système défensif de Bougie, la part que lui attribuent son importance et sa position.

Telle a été, pendant douze jours, la tache pénible mais glorieuse, imposée à la faible garnison de Bougie ; elle l'a remplie avec zèle, activité et courage. Chargé de lourds fardeaux, armé tour à tour d'un outil ou d'un fusil, le soldat a fait gaiement ce qu'on a exigé de lui ; les rencontres avec les Kabyles ont servi de passe temps et jeté une variété enviée au milieu des travaux. Des traits de détermination et d'à-propos, dans tous les grades, ont été recueillis et mis à l'ordre du jour ; celle bonne tradition ne sera point perdue. Quant aux résultats qui suivront l'exécution de ces importants travaux, ce qui précède les fait suffisamment pressentir ; déjà les efforts infructueux faits par les Kabyles les 28, 29 et 30 novembre, contre le fort Clauzel, défendu par le capitaine du génie Frossard, sont venus justifier pleinement les mesures prises. On est donc enfin maître autour de Bougie, en attendant que des coups encore plus sûrs soient frappés dans l'intérieur même des tribus.

 
(Sentinelle de l'Armée.)
    

 

   
 

NOTE E.

 

Circonstances qui ont provoqué et suivi l'assassinat du commandant-supérieur de Bougie (1).

 
La catastrophe qui fait l'objet de ce qui va suivre, à l'issue d'une conférence au premier aspect si pacifique, présente, sans contre dit, le dénoument le plus extraordinaire depuis l'occupation du l'Afrique. Nous en exposerons les motifs présumés, les apprêts et les horribles détails. M. Salomon exerçait un commandement important ; sur sa personne et ses actes reposait une grande responsabilité ; il est mort, l'histoire doit commencer pour lui.

L'obtention d'un nouveau grade était l'objet constant de la préoccupation de cet officier-supérieur ; il y dirigeait ses idées, ses vues et ses démarches les plus actives. Chef de bataillon de la révolution de Juillet, nommé par le général Lamarque, à Bordeaux, où il était employé comme officier du corps royal d'état-major , le commandant Salomon, pour jouir de son nouveau grade, avait dû attendre le terme légal de quatre ans de capitaine. Ce précédent chatouillait son amour-propre ; il aimait à calculer l'avenir d'après le passé. Toutefois, une prévention défavorable l'entourait encore ; elle était relative à la malheureuse rencontre de la Rassaula , proche la Maison-Carrée, à Alger, le 23 mai 1832. Arrivé à Bougie, le 18 janvier 1834, après que son bataillon y fut tout réuni, M. Salomon saisit avec avidité la première occasion de se distinguer. Le colonel Duvivier la lui offrit le 5 mars suivant, à la retraite de Klaina. Le premier chargea donc avec l'escadron de chasseurs, quoique ce ne fût pas là sa place ; il eut un cheval tué sous lui. Ce trait lui valut la croix d'officier. Mais des passages poignants relatifs à ce mode de réhabilitation, consignés dans la correspondance officielle, et des renseignements le concernant, étaient tombés sous ses yeux 

 

(1) Extrait de l'ouvrage de M. le colonel Lapène ; Vingt-six mois de séjour à Bougie.

 
Pages précédentes   Retour page Table des matières   Pages suivantes