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NOTE J.

 
Après le brillant combat du 17 mai, le rassemblement kabyle se fondit, et les Zouaouas partirent des premiers avec Sid-el-Djoudi, leur chef. Il est curieux de voir par quels mensonges puérils cet orgueilleux montagnard s'efforçait de pallier sa défaite et de remonter le courage des siens ; voici deux lettres adressées par lui à notre khalifa Ben-Mahy-ed-Din, qui entretenait toujours dans le camp ennemi des relations propres à favoriser notre politique.

A notre frère, au plus cher de nos enfants, notre parfum, Sid Mohammed-ben-Mahy-ed-Din ; que le salut et la miséricorde de Dieu soient sur lui !

Vous m'avez écrit à diverses fois dans le but de me rapprocher de vous et de vous aider ; je vous ai écrit avec nos chefs et j'ai attendu votre réponse jusqu'à ce qu'elle me fût enfin parvenue ; vous m'y donniez rendez-vous à Flissa, pour chercher à établir la paix parmi les musulmans. J'ai pris votre avis, je me suis rendu à Flissa avec la musique et les tambours. J'étais accompagné des grands de mon corps d'armée, et cela pour vous faire plus d'honneur. Nous mîmes pied à terre en face de vous ; les Flissas vous entourèrent, ils s'occupèrent de piocher la terre pour former des redoutes, je leur dis ne vous livrez pas à ce travail, demain j'aurai une entrevue avec nos amis et je ferai régner l'anaya. Là-dessus ils cessèrent leur travail et se dispersèrent ainsi que les autres tribus qui devaient veiller. Quant à nous, nous nous mîmes sous nos tentes et nous nous livrâmes au sommeil. Nous dormîmes comme si nous avions été dans nos maisons. Tout-à-coup les infidèles nous trahirent au milieu de la nuit et il arriva ce qui arriva.

Ceci nous a fort étonnés de votre part et nous a bien embarrassés, moi et mes frères. Nous perdîmes une tente que je 

    

 

   

tenais de Sid-el-Hadj-Abd-el-Kader, valant 150 dinars, plus un quintal de poudre que nous avions apporté pour montrer notre état, plus un quintal de balles, des pistolets garnis en argent ; quant au plomb et aux pierres à fusil, j'en ignore le poids.

Or, si vous êtes mon frère, vous me renverrez ce que j'ai perdu et vous en aurez du mérite auprès de Dieu. Tous les Zouaouas se moquent de moi, de manière que mon autorité et ma réputation en souffrent. Si vous pouvez r'avoir de l'infidèle ce que je vous ai demandé, vous me l'enverrez par le porteur le plus promptement possible ; si vous ne le pouvez pas, conservez-moi toujours votre amitié ; Je la préfère à un monceau d'or. Apprenez-moi ce que fait l'infidèle, etc.....
 

De Si-el-Djoudi-ben-el-Djoudi à Mahy-ed-Din, khalifa. 
 
Après les compliments :

J'ai reçu votre lettre, je l'ai lue et comprise ; elle avait rapport aux ennemis de Dieu et de son prophète. Quant à vous, que Dieu vous récompense, vous avez craint pour nous ; Dieu garde que nous fassions comme les Arabes, et que nous nous mettions dans le cas que nos familles soient transportées (en France) ! Nous n'avons rien à redouter, Dieu et le prophète nous protègent. Vous seul des musulmans qui sont là-bas, fûtes notre ami ; vous ne devez pas vous réjouir de ce qui peut affliger les musulmans en oubliant le salut de votre âme. Dieu seul accorde la victoire. Si l'infidèle a été victorieux, ailleurs il ne le sera pas.

Je vous engage donc à être des nôtres et non avec les chrétiens ; quittez-les comme le prophète a quitté la Mecque et Médine, donnez m'en avis en secret, et j'irai à votre rencontre. Apportez avec vous toutes vos ressources, tout ce qui peut aider à vaincre.

 
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