Pages précédentes LA GRANDE KABYLIE   CHAPITRE PREMIER Pages suivantes
   Retour page Table des matières   
   
  
ce serait donc dans la langue arabe qu'il faudrait chercher de préférence l'origine de ce nom. Dès lors on ne peut plus guère hésiter qu'entre les racines suivantes :
Kuebila : tribu.
Kabel : il a accepté.
Kobel : devant.
La première s'expliquerait par l'organisation même des Kabyles en tribus fédérées.

La seconde par leur conversion à l'Islam. Vaincus et refoulés, ils n'auraient eu, comme tant de peuples, aucune autre ressource, pour se soustraire aux violences du vainqueur, que d'embrasser sa religion. Ils auraient accepté le Koran ;

La troisième n'est pas moins plausible. En appelant les Kabyles ses devanciers, l'Arabe aurait seulement constaté un fait en harmonie avec toutes les traditions, et conforme d'ailleurs au génie de l'histoire qui nous montre toujours les autochtones, puis les races vaincues, refoulées tour à tour dans les montagnes par suite des conquêtes successives de la plaine.

Chez les Kabyles, le mélange du sang germain, laissé par la conquête des Vandales, se trahit maintenant encore à des signes physiques : les étymologistes y joignent quelques rapprochements de noms : Suèves et Zouaouas, Huns et Ouled-Aoun (1), etc. Nous n'insisterons pas davantage sur toutes ces consonnances plus curieuses que décisives.

 

III.

 
La langue est la vraie pierre de touche des nationalités. Les communautés d'origine, les influences étrangères, la grandeur ou la décadence des peuples, l'attraction ou l'antipathie des races,
 

(1) Ouled signifie enfant , descendant. Ouled Aoun : enfant d'Aoun.

    

 

   
tout cela s'y reflète comme dans un miroir; et l'on serait tenté de dire, avec l'écrivain allemand : une nation est l'ensemble des hommes qui parlent la même langue.

Cette unité de langage existe, elle établit la parenté la plus certaine entre toutes les tribus kabyles non seulement de l'Algérie, mais de la côte barbaresque, et cela seul suffirait pour vider sans retour la question des origines. Des tribus parlent exclusivement arabe, par conséquent elles viennent d'Arabie. D'autres conservent un idiome différent, celui, sans aucun doute, qui régnait dans le pays avant l'invasion. De qui le tiendraient-elles, sinon de leurs ancêtres?

Les Kabyles dérivent donc d'un seul et même peuple, autrefois compact, autrefois dominateur du pays entier; mais, plus tard, refoulé dans les montagnes, circonscrit par des conquérants qui s'approprièrent les plaines, et morcelé de la sorte en grandes fractions devenues à la longue presqu'étrangères l'une à l'autre.

Depuis ce moment, la langue aborigène qu'on nomme berberïa : berbère, ou kebailia : kabyle, dut subir, en chaque point, des altérations diverses, par suite du contact plus ou moins immédiat, plus ou moins fréquent des Arabes, et par l'absorption variable des premiers conquérants européens. Il en est résulté plusieurs dialectes que voici :

  1. Le Zenatia : il existe chez les tribus kabyles qui, remontant vers l'ouest, s'étendent depuis Alger jusqu'à notre frontière du Maroc.
  2. Le Chellahya : c'est celui dont se servent presque tous les Kabyles du Maroc.
  3. Le Chaouiah : il appartient à toutes les tribus kabyles qui se sont mêlées aux Arabes, et, comme eux, vivent sous la tente, entretiennent de nombreux troupeaux.
 
Pages précédentes   Retour page Table des matières   Pages suivantes