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Citons encore une coutume généreuse. Au moment où les fruits ; les figues, les raisins, etc. ; commencent à mûrir, les chefs font publier que, pendant quinze ou vingt jours, personne ne pourra, sous peine d'amende, enlever aucun fruit de l'arbre. A l'expiration de temps fixé, les propriétaires se réunissent dans la mosquée, et jurent sur les livres saints que l'ordre n'a pas été violé. Celui qui ne jure pas paie l'amende. On compte alors les pauvres de la tribu, on établit une liste, et chaque propriétaire les nourrit à tour de rôle; jusqu'à ce que la saison des fruits soit passée.

La même chose a lieu dans la saison des fèves, dont la culture est extrêmement commune en Kabylie.

A ces époques, tout étranger peut aussi pénétrer dans les jardins, et a le droit de manger, de se rassasier, sans que personne l'inquiète ; mais il ne doit rien emporter, et un larcin, doublement coupable en cette occasion, pourrait bien lui coûter la vie.

Les Arabes, dans les combats, se coupent la tête; les Kabyles, entre eux, ne le font jamais.

Les Arabes volent partout ou ils peuvent, et surtout dans le jour. Les Kabyles volent davantage la nuit, et ne volent que leur ennemi. Dans ce cas, c'est un acte digne d'éloges ; autrement, l'opinion le flétrit.

L'Arabe a conservé quelques traditions en médecine et en chirurgie. Le Kabyle les a négligées; aussi, rencontre-t-on chez lui beaucoup de maladies chroniques.

L'Arabe ne sait pas faire valoir son argent; il l'enfouit, ou s'en sert pour augmenter ses troupeaux.

    

 

   
Le Kabyle, contrairement à la loi musulmane, prête à intérêts, à très-gros intérêts, par exemple à 50 pour 100 par mois ; ou bien il achète, à bon marché et à l'avance, les récoltes d'huile, d'orge, etc.

Les Arabes classent les musiciens au rang des bouffons : celui d'entr'eux qui danserait, serait déshonoré aux yeux de tous. Le Kabyle aime à jouer de sa petite flûte, et chez lui, tout le monde danse, hommes et femmes, parents et voisins. Les danses s'exécutent avec ou sans armes.

 

IV.

 
Chez les Arabes, quand on célèbre un mariage, on exécute des jeux équestres avant d'emmener la fiancée. Chez les Kabyles, les parents ou amis du marié tirent à la cible. Le but est ordinairement un oeuf, un poivron, une pierre plate. Cet usage donne lieu à une grande explosion de gaîté : ceux qui manquent le bût sont exposés à de nombreuses plaisanteries.

Lorsqu'un Kabyle veut se marier, il fait part de son désir à un de ses amis qui va trouver le père de la jeûne fille recherchée, et transmet la demande. On fixe la dot qui sera payée par le mari ; car ce dernier achète littéralement sa femme, et le grand nombre des filles est regardé comme une richesse de la maison. Ces dots d'élèvent moyennement à une centaine de douros. Il arrive quelquefois que le futur mari ne possède point la somme toute entière ; on lui accorde, pour la réunir, un ou deux mois ; et pendant ce temps, il peut fréquenter la maison de celle qui doit être sa femme.

Quand il s'est acquitté, il l'emmène en qualité de fiancée, la promène d'abord dans le village, armé d'un yatagan, d'un fusil et d'une paire de pistolets, puis, l'emmène sous son toit. 

 
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