si convaincu, si adroit à faire
ressortir la faute impardonnable d'une alliance avec les Turcs
oppresseurs et déchus, que tout le monde finit par se ranger
à son avis.
Bientôt, par suite de la renonciation du bey tunisien, les
troupes françaises occupèrent Oran. La guerre s'était
allumée entre elles et les tribus arabes. Dans ces combats du
commencement de 1832, le jeune Abd-el-Kader se distingua par
son sang-froid et son audace ; il eut son cheval tué sous lui
près du fort Saint Philippe, et sa réputation ne cessa de
grandir.
Le père, de son côté, tenait le premier rang parmi les
hommes sages, en dehors de tous les partis, effrayés des
malheurs publics et se dévouant à y porter remède. Ce
remède bien connu, mais difficile à rencontrer, consistait
dans le choix d'un chef unique, assez vigoureux pour briser
toutes les résistances provenant de mauvaises passions. On
savait en effet que, semblable à son coursier, l'Arabe a
besoin d'un maître qui sache manier avec une égale hardiesse
le mors et le chabir (1).
Les chefs des trois plus grandes tribus de la province,
Hachems, Beni-Amer et Garabas, poussés à bout par la misère
publique, se réunirent dans la plaine d'Eghrës, avec
l'intention de prendre un parti définitif ; ils offrirent le
pouvoir à Mahy-ed-Din, pour lui-même ou pour son fils
Abd-el-Kader, disant qu'ils le rendraient responsable devant
Dieu des maux qui pourraient résulter de son refus.
Se sentant maître de la situation, Mahy-ed-Din l'exploita
très-habilement par une suite de refus et de délais bien
calculés. Les instances se renouvelèrent avec d'autant plus
d'énergie ; enfin, un marabout célèbre, âgé de cent-dix
ans, Sidi El-Aratch,
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