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Nous n'avons rien à dire des populations qui avoisinent son embouchure. Ce sont les Mzaïs, les Beni bou-Msaoud et les Beni-Mimoun. Leurs relations fréquentes avec la garnison de Bougie nous a conduits à en parler plus haut.

Derrière elles s'étendent deux confédérations séparées par le cours de la Summam. Sur la rive droite, celle des Abd-el-Djebar, des Beni-Ourghlis, Beni Mansour et neuf tribus secondaires, possède quatre vingt-six villages avec 6,090 fusils. Elle a été citée plusieurs fois, dans l'histoire de l'occupation de Bougie, comme soumise à l'influence des Oulid-ou-Rabah, cette grande famille du pays. On se souvient de son chef, Si Sâad, qui mourut quelque temps après avoir signé l'éphémère traité du colonel Lemercier. On doit se rappeler encore mieux le frère, Mohammed-ou-Amzian, qui recueillit l'héritage du pouvoir, et s'acquit, par l'assassinat du commandant Salomon de Musis, une triste célébrité.

La rive gauche appartient à une confédération de six tribus : trois petites et trois grandes. Celles-ci sont les Ayt-Amer, les Tendjas et les Fenaïas. La dernière, comme la plus puissante, donne son nom au soff, qui peut lever 3,050 fusils, disséminés dans trente-sept villages.

C'est sur le territoire de ces deux confédérations que la vallée de la Summam se rétrécit de manière à former, sur une largeur de huit à dix kilomètres, le dangereux défilé de Fellaye.

Au-dessus, les deux rives se trouvent occupées par une petite ligne toute exceptionnelle. Son centre, son lien politique est la célèbre zaouia de Sidi Ben-Ali-Chériff, située à Chellata ; son chef n'est autre que le marabout héréditaire qui dirige l'établissement sacré. Quarante-un villages sont peuplés des serviteurs de cette zaouïa, et lui fournissent au besoin 2,800 défenseurs. Mais sa défense la plus sûre consiste dans la 

    

 

   
vénération religieuse qu'elle inspire à tous les Kabyles.

En remontant un peu la rive droite de la Summam, on arrive au milieu d'une population industrielle et laborieuse entre toutes celles de la Kabylie. Les Beni- Abbas se comportent comme un soff isolé. Leurs dix-neuf villages peuvent mettre 4,000 hommes sous les armes. La ville de Kuelâa se trouve sur leur territoire. Ils touchent aux Bibans et à la plaine de la Medjana. Celle-ci leur doit la grande famille des Ouled-Mokhranis, qui y commande actuellement et qui conserve encore une partie de son influence sur les Beni-Abbas ; en sorte qu'elle s'appuie en même temps, particularité très-rare, sur des Kabyles et sur des Arabes. Les traditions sont prolixes, mais souvent contradictoires, en ce qui concerne les ancêtres des Mokranis.

Il parait que quatre ou cinq siècles se sont écoulés depuis l'apparition dans le pays du premier de ce noms, appelé Bouzid. Chérif et marabout, il venait, selon les uns de Fez, selon d'autres du Sahara tunisien. Quoi qu'il en soit, sa famille prospéra chez les Beni-Abbas. Un de ses descendants fonda la capitale d'un petit état indépendant à Kuelâa, dont il devint sultan. Plus tard se levèrent les jours d'adversité : la famille Mokhrani descendit dans la Medjana, suivie d'une smala considérable, et bientôt y conquit, à peu de chose près, la souveraineté qu'elle venait de perdre sur les gens de la montagne.

Un Mokhrani eut d'eux fils, que des songes prophétiques lui présentèrent comme destinés à devenir la source de deux branches hostiles, et vouées, l'une à la guerre, l'autre aux études religieuses. Que cette prédiction soit où non rétrospective, elle n'en consacre pas moins un fait réel. Dès le commencement de leurs relations avec la Medjana, les Français y trouvèrent, outre un centenaire impotent du nom de Mohammed- ben-Abd-allah, deux Mokhranis rivaux : Abd-el-Salem, surnommé El-Tobal (le boiteux), homme de religion et Sid Hamed-hen-Mohammed, 

 
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