" Les malheurs m'ont
changé, répondit Ben Daly-Coutchouk ; mais je remercie Dieu
de ce qu'enfin tu m'as reconnu.
" - Ne lui faites pas de mal, dit alors Ben-Zamoun ;
c'est un homme sage et avancé en âge ; il pourra vous
servir. " La recommandation du chef des Flissas sauva la
vie à Ben-Daly-Coutchouk ; mais il fut mis aux fers près de
vingt-cinq Courouglis de Hhal-el-Argoub qui attendaient
déjà, dans cette position, le parti qu'on prendrait à leur
égard. Eux, les femmes et les enfants, étaient parqués avec
les nombreux troupeaux des Zouathnas, devenus la propriété
de l'émir.
Le lendemain, Abd el-Kader chargea Si-Allal-el-Merigry,
chef des Beni-Djâd, de compléter son opération en enlevant
deux villages où tenait encore un noyau de Courouglis.
Attaqués par des forces supérieures, ces malheureux subirent
aussi le pillage ; leurs troupeaux rejoignirent les autres au
camp.
Les troupes régulières furent encouragées à ces sortes
d'exécutions par l'abandon complet de tous les riches
habillements, de toutes les armes et de tous les objets volés
ou pris. La vente des troupeaux qui produisit une somme
très-forte fut seule réservée pour le trésor public ( bit-el-mal).
Quant aux prisonniers faits dans cette affaire, on les
dirigea tous sur une fraction des Beni-hou-Yagoub appelée
Ouzera, dans la province de Tittery.
Un marabout vénéré de ce pays versa des larmes en voyant
les nouveaux venus et leur profonde misère. " Allez,
leur dit-il, vos gardiens sont peu nombreux, dispersez-vous
dans les montagnes ; je vous assure que Dieu vous couvrira de
sa protection. " Ils suivirent son conseil et parvinrent
à rentrer dans leur pays, mais décimés, sans chefs et
dénués de tout. La ruine de la belle tribu des Zouathnas
était accomplie sans retour.
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