ennemis, et envoya prier
Ben-Thaleb d'incendier également son fort de Bel-Kraroube ;
puis, courant les montagnes, à force de supplications et de
fatigues, il parvint à rallier quelques milliers de fusils,
avec lesquels il se mit en observation sur le territoire des
Nezlyouas.
Le 5 mai, de grand matin, la colonne française, commandée
par le Gouverneur-Général, quitta son camp, situé sur l'Isser,
et entra dans l'étroite vallée de l'Oued-Soufflat, qui
remonte vers Bel-Kraroube. Des bataillons furent postés sur
les éminences de droite et de gauche, le convoi défila dans
le lit de la rivière.
A peine l'arrière-garde y pénétra-t-elle à son tour,
que les Kabyles de Ben-Salem commencèrent l'attaque, mais
assez mollement. Toutefois, à cause des sinuosités de la
rivière et de l'allongement qu'avait dû prendre la colonne,
le bruit de cette fusillade ne parvint pas au général.
Pendant toute la durée de l'étape, qui se trouvait fort
courte, l'arrière-garde resta seule engagée ; elle arrêta
fréquemment l'ennemi par des feux de peloton qui
déconcertaient les Kabyles et leur faisaient dire : "
Ces gens ne manquent point de poudre ; nous n'avons rien à
gagner avec eux. "
L'affaire allait se terminer ainsi, lorsque le Gouverneur,
après avoir fait camper, devant Bel-Kraroube, la tête de
colonne, vit lui-même ce qui se passait à la gauche. Alors,
il lança le 48e, sans sacs, pour refouler l'ennemi jusqu'à
la vallée de l'Isser. Ce retour offensif eut plein succès et
balaya de suite le terrain ; mais il coûta la vie au colonel
Leblond, frappé d'une balle au moment où il entamait la
charge avec son assurance accoutumée.
Le soir même et le lendemain, du haut d'une montagne
voisine, Ben-Salem assista douloureusement à la destruction
de son fort. Sa maison, qui aurait pu passer pour belle, même
dans une ville, ses magasins considérables, ses vastes silos
dont les vainqueurs
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