; il feignit une désertion et se
mit en route pour tenter le coup, mais le cœur lui manqua.
Ben-Salem crut mieux réussir en s'adressant au plus
intrépide bandit de la contrée, appelé Bou Boch-Boch, qui
d'ailleurs ne manquait pas de fanatisme. Le Koran à la main,
il s'empara de son esprit, lui renouvela les promesses faites
à Hamed et y ajouta celle du paradis, selon le résultat de
l'entreprise ; lui-même, il chargea de sept balles le
tromblon du brigand, fit sur l'arme, sur l'homme, des prières
sacramentelles et se crut assuré du succès.
Deux jours après, Bou Boch-Boch était reconnu dans le
camp de Ben Mahy-ed-Din, comme un homme qui fréquentait
assidûment celui de l'ancien khalifa. On en vint aux
recherches : elles produisirent assez de charges contre ce
misérable pour le faire expédier sur Alger, et de là en
France où il attend le paradis au fort Brescou.
Ben-Salem interpellé par la suite sur ces tentatives
d'assassinat, ne parut jamais croire qu'il dût, dans
l'intérêt de son honneur, les nier ou s'en excuser ; il
s'est toujours contenté de répondre : " C'était mon
ennemi ! "
En ce moment, courut une grande nouvelle, qui acheva de
mettre Ben-Salem à terre. La smala de l'émir venait d'être
enlevée : lui-même confirmait la vérité du fait, en
s'efforçant de pallier son importance ; car il écrivait dans
ces termes : " Les Français ont fait une razzia sur ma
smala, pendant que j'étais absent. Nous avons perdu quelques
femmes, mais nous n'en sommes pas fâchés ; cela nous rendra
plus légers, plus dispos pour la guerre. Les femmes de
Ben-Allal ont été prises ; le lendemain il avait épousé la
fille de Berkani. Nous n'y pensons donc plus. "
Mais le peuple kabvle y songea longtemps et beaucoup.
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