un impie qui consentit à assassiner son
frère, et cependant vous êtes éblouis par le faux éclat du
chrétien. Ah! ne vous y laissez pas prendre. Eût-il la
puissance de déplacer des montagnes, le prestige qui
l'environne passera comme un songe, s'évanouira comme l'ombre
d'un nuage d'été ; car si l'injustice a pu séduire, la
vérité doit triompher en dernier lieu.
Il n'y a pas d'action plus blâmable sur la
terre que celle de servir les infidèles, comme il n'y a pas
de plus mauvaise excuse aux yeux de Dieu que celle de la peur.
La peur donnée pour excuse ne pourra vous mettre à l'abri de
la colère du Tout-Puissant. Dans les circonstances où vous
vous trouvez, elle est tout-à-fait inadmissible, puisque
c'est la fuite qui vous est prescrite, et que le pays des
musulmans est assez vaste pour vous recevoir.
Il est réellement inconcevable que vous
vous disiez musulmans, que vous vous disiez croyants, que vous
prétendiez connaître la grandeur et la puissance de Dieu,
quand vous demandez des faveurs aux infidèles et que vous
rangez sous leurs ordres.
Dieu a dit : " Faites connaître aux
rebelles qu'un châtiment sévère les attend. Faites le
savoir principalement à ceux qui prennent pour chef des
impies, au lieu de suivre la voie des musulmans ; à ceux qui
briguent leurs honneurs, oubliant que tout honneur vient de
Dieu. " Il a ajouté : " O vous qui croyez, ne vous
donnez pas pour chefs des infidèles, ne choisissez que des
musulmans ; n'allez pas fournir ainsi des preuves terribles
contre vous. " II a dit encore : " Ceux qui
acceptent des infidèles, deviennent infidèles comme eux.
"
Il est impossible de trouver un peuple
croyant en Dieu et au jugement dernier, qui puisse conserver
de l'affection pour ceux qui méconnaissent l'Éternel et son
Prophète, fussent-ils même leurs pères, leurs frères ou
leurs amis.
Dans un autre passage il est dit : "
Ne prenez jamais pour chefs mes ennemis et les vôtres ; vous
êtes coupables si vous venez à préférer au Prophète votre
père, votre fils, votre femme, votre entourage ou vos
richesses. "
Les trêves à conclure avec les infidèles
ne peuvent être décidées que par le souverain. Elles se
font ordinairement dans le but d'obtenir des avantages pour
les musulmans ; mais elles ne peuvent avoir lieu à des
conditions désavantageuses, comme de payer une capitation (
djazia), de faire le commerce et de vendre des chevaux, parce
que tout cela est à l'avantage des impies. Au surplus, notre
souverain, celui qui seul a le droit de traiter, est en vie ;
nous l'avons reconnu dans la bonne fortune et nous devons
également le reconnaître dans la mauvaise. Sachez donc que
s'il avait cru voir dans la paix quelques avantages pour les
musulmans, il l'aurait acceptée et signée avant vous.
Tout ce que j'ai pu comprendre dans votre
conduite, c'est que vous embrassez la religion de ceux qui
vous dominent. Est-ce un sultan musulman, vous vous soumettez
à lui ; est-ce un infidèle, vous lui obéissez. Ces actions
décèlent des hommes sans foi ni loi. Vous savez pourtant que
Dieu est tout-puissant et qu'il connaît et sait tout. Il a
dit : " Si vous êtes musulmans, ne redoutez jamais ceux
qui ne me redoutent pas, car Dieu est souveraine ment bon avec
ses créatures. "
En vous-mêmes, vous pensez agir d'une
manière convenable en cherchant de donner de l'assiette au
pays, et vous ne vous apercevez pas que vous ébranlez tout,
au contraire. Votre conduite aura pour résultat de livrer vos
frères aux infidèles, et cependant vous n'avez aucune
mission pour cela ; Dieu ne vous en a pas chargés. C'est lui
seul qui peut en disposer ; c'est lui qui punit ; il est
infiniment éclairé et rien ne lui échappe. Vous ne pouvez
donc être lavés de vos turpitudes, dans ce monde et dans
l'autre, qu'en vous repentant sincèrement et en demandant
pardon à l'Éternel.