Ainsi, plus de douze ans après
avoir été conquise, la capitale de l'Algérie vit pour la
première fois dans ses murs des chefs de l'est importants et
nombreux. Ceux-ci remarquèrent à leur tour les grands
changements qu'avait subis la ville, les immenses ressources
de tout genre que nous y accumulions et nos gigantesques
projets en cours d'exécution. Ils comprirent, à cet aspect,
que la France avait tout ensemble les moyens et la volonté de
s'éterniser dans le pays.
Dès le matin, notre khalifa, son frère, trois aghas et
cent douze caïds se rendaient, insignes déployées, du
faubourg Bab-Azoun au palais du Gouvernement. Ils furent
introduits dans la cour de marbre : là, sur une table,
étaient placés le drapeau arabe aux couleurs de la France,
les burnous, signes distinctifs des pouvoirs qui allaient
être conférés, et des armes splendides que le gouvernement
distribuait comme une preuve de sa munificence.
Le général Bugeaud descendit entouré de son état major
et de quelques autorités supérieures ; le cadi et le muphti
d'Alger s'y trouvaient. Les Arabes formant un vaste
demi-cercle, faisaient tous face au Gouverneur qui prit la
parole en ces termes :
" Avant que je vous remette ces vêtements, signes
distinctifs de la nouvelle autorité que je vais vous
conférer au nom et par la permission du glorieux, du sublime
sultan Louis-Philippe, roi des Français, que Dieu le protège
de sa toute-puissance, il est de mon devoir de vous faire
comprendre l'importance de cette investiture... Vous
contractez aujourd'hui l'obligation d'être fidèles au
gouvernement du roi des Français, de traiter ses ennemis
comme vos ennemis, de regarder ses amis comme vos amis,
d'obéir à ses délégués français et musulmans.
" Vous êtes venus ici librement.... vous êtes libres
encore
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