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latin, à recevoir la monnaie et les marchandises des Romains;
c'était de la pénétration pacifique.
Après la mort de Micipsa, des luttes éclatèrent entre ses fils et
son neveu Jugurtha. Ce dernier, brave, intelligent et sans
scrupules, fit assassiner ses cousins et s'empara du pouvoir. Rome
lui ayant déclaré la guerre, il fallut quatre années de pénibles
campagnes pour venir à bout de lui; il acheta par des présents la
complicité de la plupart des généraux, qui lui vendaient la paix
ou se faisaient battre. Jugurtha était d'ailleurs un véritable
homme de guerre, sachant utiliser à merveille la structure et les
ressources du pays ; il excellait à surprendre l'ennemi, à
l'arrêter dans des défilés montagneux ou à l'attirer au loin
dans des régions désertes et sans eau. Évitant les batailles
rangées, il multipliait les escarmouches, les surprises, les petits
engagements; spargit bellum, dit Salluste. Vaincu, il disparaissait
dans le Sud ou au fond de la Maurétanie pour reparaître peu
après. Enfin Métellus et Marius vinrent à bout de lui. Métellus
rétablit la discipline dans l'armée, repoussa les propositions de
paix de Jugurtha, le défit sur le Muthul et s'empara
successivement des forteresses dans lesquelles il trouvait un
point d'appui. Jugurtha s'enfuit dans le Sud et réussit à y
recruter une nouvelle armée. Mais, vaincu une fois encore sur la
Moulouya, il fut livré par son beau-père Bocchus, roi de
Maurétanie et amené à Rome où il périt dans un cachot. Jugurtha
est un prototype d'Abd-elKader ; la manière dont il conduisit la
lutte contre les Romains montre que le pays et les indigènes n'ont
guère changé depuis l'antiquité.
La ruine de Jugurtha amena une nouvelle division territoriale. Une
partie des États du roi des Numides, voisine de la province
romaine, fut annexée à celle-ci; le centre fut donné à des
princes de la famille de Massinissa ; la partie occidentale fut
attribuée à Bocchus en récompense de sa trahison. Aucun des rois
indigènes ne songea plus à secouer le joug; ils furent désormais
de simples agents de la politique romaine; leurs enfants étaient
élevés dans l'admiration du peuple-roi. Le type de ces souverains
est Juba II, qui fut successivement roi de Numidie et de Maurétanie
; amené à Rome encore enfant par César, on lui fit épouser une
fille de Cléopâtre et d'Antoine, à laquelle on avait inspiré
comme à lui le respect de Rome. C'était un prince très cultivé,
philologue, naturaliste, géographe, historien; la vieille cité
phénicienne de Iol, où il résidait, prit le nom de Cæsarea; il
l'embellit de somptueux monuments. « La petite ville de Cherchel,
qui a succédé à Cæsarea, s'enorgueillit, dit S. Gsell, de son
musée où sont accumulés les témoignages de cette antique
splendeur, copies habiles et fidèles d'œuvres des grands maîtres,
qui répandent sur ce coin de la chaude Afrique un parfum exquis
d'hellénisme. »
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