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  VUE GÉNÉRALE DE L'ALGÉRIE JUSQU'AU XVI SIÈCLE  
     
   latin, à recevoir la monnaie et les marchandises des Romains; c'était de la pénétration pacifique.
Après la mort de Micipsa, des luttes éclatèrent entre ses fils et son neveu Jugurtha. Ce dernier, brave, intelligent et sans scrupules, fit assassiner ses cousins et s'empara du pouvoir. Rome lui ayant déclaré la guerre, il fallut quatre années de pénibles campagnes pour venir à bout de lui; il acheta par des présents la complicité de la plupart des généraux, qui lui vendaient la paix ou se faisaient battre. Jugurtha était d'ailleurs un véritable homme de guerre, sachant utiliser à merveille la structure et les ressources du pays ; il excellait à surprendre l'ennemi, à l'arrêter dans des défilés montagneux ou à l'attirer au loin dans des régions désertes et sans eau. Évitant les batailles rangées, il multipliait les escarmouches, les surprises, les petits engagements; spargit bellum, dit Salluste. Vaincu, il disparaissait dans le Sud ou au fond de la Maurétanie pour reparaître peu après. Enfin Métellus et Marius vinrent à bout de lui. Métellus rétablit la discipline dans l'armée, repoussa les propositions de paix de Jugurtha, le défit sur le Muthul et s'empara successive­ment des forteresses dans lesquelles il trouvait un point d'appui. Jugurtha s'enfuit dans le Sud et réussit à y recruter une nouvelle armée. Mais, vaincu une fois encore sur la Moulouya, il fut livré par son beau-père Bocchus, roi de Maurétanie et amené à Rome où il périt dans un cachot. Jugurtha est un prototype d'Abd-el­Kader ; la manière dont il conduisit la lutte contre les Romains montre que le pays et les indigènes n'ont guère changé depuis l'antiquité.
 
La ruine de Jugurtha amena une nouvelle division territoriale. Une partie des États du roi des Numides, voisine de la province romaine, fut annexée à celle-ci; le centre fut donné à des princes de la famille de Massinissa ; la partie occidentale fut attribuée à Bocchus en récompense de sa trahison. Aucun des rois indigènes ne songea plus à secouer le joug; ils furent désormais de simples agents de la politique romaine; leurs enfants étaient élevés dans l'admiration du peuple-roi. Le type de ces souverains est Juba II, qui fut successivement roi de Numidie et de Maurétanie ; amené à Rome encore enfant par César, on lui fit épouser une fille de Cléopâtre et d'Antoine, à laquelle on avait inspiré comme à lui le respect de Rome. C'était un prince très cultivé, philologue, naturaliste, géographe, historien; la vieille cité phénicienne de Iol, où il résidait, prit le nom de Cæsarea; il l'embellit de somptueux monuments. « La petite ville de Cherchel, qui a succédé à Cæsarea, s'enorgueillit, dit S. Gsell, de son musée où sont accumulés les témoignages de cette antique splendeur, copies habiles et fidèles d'œuvres des grands maîtres, qui répandent sur ce coin de la chaude Afrique un parfum exquis d'hellénisme. »
 
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