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  VUE GÉNÉRALE DE L'ALGÉRIE JUSQU'AU XVI SIÈCLE  
     
   villes, les villages, les fermes se fortifient. La population a perdu tout esprit militaire et le métier des armes est de moins en moins estimé. La vie se retire du régime municipal. La classe moyenne tend à disparaître et ne se recrute plus. Les petits propriétaires deviennent de simples cultivateurs sur la terre d'autrui et tombent peu à peu au rang des serfs de la glèbe, que l'on vend avec la terre.
Vers 290, Dioclétien partagea l'empire en préfectures et en diocèses. La Maurétanie tingitane fut rattachée au diocèse d'Espagne; le reste de l'Afrique du Nord forma un diocèse rattaché à la préfecture d'Italie et divisé en six provinces, dont trois correspondent à l'Algérie actuelle: la Numidie, chef-lieu Cirta ; la Maurétanie sitifienne, chef-lieu Sétif; la Maurétanie césarienne, chef-lieu Caesarea. En même temps que s'accomplissait ce remaniement territorial, on séparait complètement l'autorité civile et le commandement militaire; dans chaque province, il y avait un praeses, gouverneur civil, et des duces, chefs militaires, sans liaison ni subordination des uns aux autres. Cette idée de la séparation des pouvoirs, que nous avons héritée du Bas-Empire, était singulièrement contraire à l'ancienne idée romaine de l'imperium un et indivisible.
 
 

LE CHRISTIANISME AFRICAIN

Le christianisme, apporté de bonne heure en Afrique, y avait trouvé des prosélytes enthousiastes. La religion chrétienne plut sans doute aux Africains par son caractère révolutionnaire ; elle sapait la société romaine jusque dans ses fondements. Elle proclamait que tous les hommes sont égaux et frères; elle était la religion des opprimés, de tous ceux qui souffraient; elle relevait l'esclave courbé sur la glèbe; elle rendait l'espoir et la dignité aux pauvres, leur promettait un meilleur avenir en ce monde ou dans l'autre. Au culte des empereurs elle substituait celui du Dieu unique. Tout cela séduisait les masses indigènes.
Le christianisme, qui fit la grandeur historique de l'Afrique romaine, contribua à sa décadence matérielle. Pendant les persécutions, l'Église détourna les fidèles du service militaire et des fonctions publiques, où il fallait faire sans cesse acte de paganisme. L'hostilité des chrétiens africains contre l'empire présente une âpreté particulière; Tertullien surtout est plein d'anathèmes contre Rome : « Nous ne sommes que d'hier, disait-il, et nous remplissons tout ce qui est à vous, vos villes, vos places fortes, vos colonies, vos bourgades, vos assemblées, vos camps, vos tribus, vos décuries, le palais, le sénat, le forum; nous ne vous laissons que vos temples. » Au milieu du troisième siècle, avec saint Cyprien, l'église de Carthage tient presque autant de place dans l'ensemble de la vie chrétienne que l'église
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