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Le port d'Alger, qui comptait autrefois plus de 300 raïs, n'en a
plus que 24 en 1725 ; les bagnes, où il y avait eu 30 000 esclaves,
n'en ont plus que 3 ou 4 000; la milice, qui avait eu jusqu'à 22
000 hommes, est réduite de moitié; elle perd même cette
supériorité de bravoure et de discipline qu'elle avait eue
jusqu'alors sur les indigènes. La population est décimée par des
pestes et des famines presque périodiques; les révoltes
d'esclaves, de Koulouglis, de Kabyles, sont continuelles. A peine un
complot est-il apaisé qu'il en renaît un autre.
La Porte, harcelée par les réclamations des puissances
européennes, essayait parfois d'intervenir. Ses envoyés étaient
accueillis avec de grands honneurs, ils offraient au dey le caftan
d'investiture et le sabre encerclé de diamants en présence du
Divan assemblé, la lecture du firman du Grand-Seigneur était
écoutée avec un silence respectueux. Mais, lorsqu'on en arrivait
aux réclamations, la séance devenait tumultueuse, les Algériens
refusaient d'obéir aux ordres de leur suzerain : « Nous sommes les
maîtres chez nous, disaient-ils, et nous n'avons d'ordres à
recevoir de personne. »
La Régence était assaillie de temps à autre par ses voisins de
l'Ouest et de l'Est, Marocains et Tunisiens, parfois unis contre
elle. Les Algériens étaient en général facilement vainqueurs;
ils entrèrent à Tunis à diverses reprises, mais ils , ne
réussirent jamais à conquérir la Tunisie d'une manière
définitive, ni même à la soumettre à un tribut; aussitôt qu'ils
étaient repartis, le tribut leur était de nouveau refusé.
Depuis le jour où les Espagnols avaient été vaincus devant
Mostaganem, ils étaient étroitement assiégés par les indigènes
dans les quelques places fortes qu'ils avaient conservées. En 1708,
le dey Mohammed-Bagdach, aidé par le bey de Mascara, Bou-Chlaghem,
réussit à enlever Oran et Mers-el-Kébir ; le comte de Montemar
reprit ces places en 1732, en augmenta les fortifications et
s'approvisionna par quelques razzias bien conduites. Mais l'Espagne
ne tenait guère à ces possessions qui lui coûtaient chaque année
plus de quatre millions. L'abandon d'Oran et de Mers-el-Kébir avait
été convenu dans le traité conclu en 1785 entre la Régence et
l'Espagne. En 1790, un terrible tremblement de terre renversa les
fortifications et les maisons d'Oran et hâta la solution
décidée de part et d'autre. L'évacuation fut terminée en mars
1792.
Mohamed-ben-Osman (1766-1791) rendit quelque vitalité au moins
apparente à l'État algérien. C'était un homme sage, travailleur,
d'un esprit juste et ferme; ce fut certainement le meilleur de tous
les deys qui se succédèrent sur le trône d'Alger, qu'il occupa
pendant vingt-cinq ans en dépit de nombreuses conspirations ;
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