Page précédente HISTOIRE DES COLONIES FRANÇAISES - Tome2 - Retour page Table des matières ALGÉRIE - LIVRE PREMIER - CHAP. 2 Page suivante
  L'ALGÉRIE SOUS LES TURCS  
     
  
A partir du jour de son élection, il était séparé de sa famille, car aucune femme ne pouvait pénétrer dans le palais, sinon en audience publique. Le jeudi, après la prière du dohor, les gardes l'escortaient jusqu'à sa maison particulière, où ils venaient le reprendre le lendemain un peu avant midi pour le conduire à la grande mosquée. Puis il rentrait à la Jenina jusqu'au jeudi suivant. Quand il périssait de mort violente, ses biens étaient confisqués au profit de l'état. « Ainsi vit cet homme, écrit Juan Cano, riche sans être maître de ses trésors, père sans enfants, époux sans femme, despote sans liberté, roi d'esclaves et esclave de ses sujets. »
Lorsque la réunion du Divan des janissaires ne fut plus qu'une vaine formalité, le pouvoir du dey devint absolu en principe. Il recevait tous les deux ou trois ans un caftan d'honneur du sultan de Constantinople et ce don traditionnel était tout ce qui attestait sa vassalité purement théorique vis-à-vis de la Porte. Il était assisté d'un conseil d'État ou Divan du pacha dont les membres, choisis par lui, prirent le nom de Puissances. Ce conseil se composait de cinq ministres : le khasnadji ou trésorier, l'agha, commandant l'armée de terre, l'oukil-el-hardj, ministre de la Marine, le bit-el-maldji, intendant du domaine et gérant des successions en déshérence, le khodjet-el-kheïl, receveur général des tributs tant en argent qu'en nature. Au-dessous de ces cinq puissances venait le khasnadar, trésorier particulier du dey, puis les khodjas ou secrétaires, chargés des écritures et de la paye, et des chaouchs ou huissiers.
Le chef de l'État tenait audience tous les matins, sauf le mardi, jour de grand conseil, et rendait la justice à tous, sauf aux janissaires qui ne relevaient que de la juridiction de leur agha. Les délits étaient punis de l'amende ou de la bastonnade, les crimes de la décapitation ou de la strangulation. La torture, le pal et les ganches, longs crochets de fer sur lesquels on précipitait le condamné du haut des remparts, étaient réservés aux condamnés politiques, le bûcher aux apostats et aux juifs. Les ganches se trouvaient à la porte Bab-Azzoun, le pal et les bûchers se dressaient sur le môle ou à la porte Bab-el-Oued. Jamais les janissaires n'étaient exécutés publiquement dans l'enceinte de la ville; ils subissaient leur supplice dans la cour du palais de l'agha.

LES REVENUS DE LA RÉGENCE

Les revenus réguliers consistaient dans les produits du domaine, les droits de douane et d'octroi, les confiscations, les amendes, les déshérences, les tributs payés par les beys et les caïds. Mais
 
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