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A partir du jour de son élection,
il était séparé de sa famille, car aucune femme ne
pouvait pénétrer dans le palais, sinon en audience
publique. Le jeudi, après la prière du dohor, les gardes
l'escortaient jusqu'à sa maison particulière, où ils
venaient le reprendre le lendemain un peu avant midi pour le
conduire à la grande mosquée. Puis il rentrait à la
Jenina jusqu'au jeudi suivant. Quand il périssait de mort
violente, ses biens étaient confisqués au profit de
l'état. « Ainsi vit cet homme, écrit Juan Cano, riche
sans être maître de ses trésors, père sans enfants,
époux sans femme, despote sans liberté, roi d'esclaves et
esclave de ses sujets. »
Lorsque la réunion du Divan des janissaires ne fut plus
qu'une vaine formalité, le pouvoir du dey devint absolu en
principe. Il recevait tous les deux ou trois ans un caftan
d'honneur du sultan de Constantinople et ce don traditionnel
était tout ce qui attestait sa vassalité purement
théorique vis-à-vis de la Porte. Il était assisté d'un
conseil d'État ou Divan du pacha dont les membres, choisis
par lui, prirent le nom de Puissances. Ce conseil se
composait de cinq ministres : le khasnadji ou trésorier,
l'agha, commandant l'armée de terre, l'oukil-el-hardj,
ministre de la Marine, le bit-el-maldji, intendant du
domaine et gérant des successions en déshérence, le
khodjet-el-kheïl, receveur général des tributs tant en
argent qu'en nature. Au-dessous de ces cinq puissances
venait le khasnadar, trésorier particulier du dey, puis les
khodjas ou secrétaires, chargés des écritures et de la
paye, et des chaouchs ou huissiers.
Le chef de l'État tenait audience tous les matins, sauf le
mardi, jour de grand conseil, et rendait la justice à tous,
sauf aux janissaires qui ne relevaient que de la juridiction
de leur agha. Les délits étaient punis de l'amende ou de
la bastonnade, les crimes de la décapitation ou de la
strangulation. La torture, le pal et les ganches, longs
crochets de fer sur lesquels on précipitait le condamné du
haut des remparts, étaient réservés aux condamnés
politiques, le bûcher aux apostats et aux juifs. Les
ganches se trouvaient à la porte Bab-Azzoun, le pal et les
bûchers se dressaient sur le môle ou à la porte
Bab-el-Oued. Jamais les janissaires n'étaient exécutés
publiquement dans l'enceinte de la ville; ils subissaient
leur supplice dans la cour du palais de l'agha. |
LES REVENUS DE LA
RÉGENCE |
Les revenus réguliers
consistaient dans les produits du domaine, les droits de
douane et d'octroi, les confiscations, les amendes, les
déshérences, les tributs payés par les beys et les
caïds. Mais |
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