de l'ambre dans l'antiquité, dont le transport créa les premières
routes commerciales entre la Baltique et la Méditerranée. Pour les
échanges avec les populations de l'Orient, notamment avec l'Inde,
le corail était un des assortiments nécessaires des cargaisons.
La pêche du corail était de tradition séculaire chez les
Corses; ils étaient au courant de l'organisation que lui avaient
donnée les Génois; désireux de s'affranchir du joug de Gênes, un
certain nombre d'entre eux émigrèrent à Marseille, où Lenche,
dont le vrai nom est probablement Lencio, fonda la première
Compagnie du corail, dans laquelle entrèrent beaucoup de nobles
marseillais, en particulier Jean Riquetti, ancêtre des Mirabeau. La
Compagnie marseillaise obtint le privilège de la pêche du corail
sur toutes les côtes de Barbarie, depuis Montefousque (le cap
Mafetouche près du cap de Fer) jusqu'au cap Nègre en face de
Tabarka, en vertu de lettres royales de 1553 et d'un commandement du
Grand Seigneur de 1582. Dès 1564, la Compagnie apparaît fortement
constituée et recrutée dans l'élite du commerce marseillais.
Les établissements appelés " les Concessions d'Afrique
" sont-ils aussi anciens que la Compagnie elle-même ? Nous
l'ignorons. Par la suite, elle eut quatre établissements fixes :
Bône, la Calle (Mersa-el-Kharez, le port aux breloques), le
Bastion-de-France et le cap Rose. Le Bastion-de-France, centre des
opérations de la Compagnie, s'élevait à dix kilomètres à
l'Ouest de la Calle, à égale distance entre ce port et celui de
Bône ; on y voit encore les restes d'une tour qui s'élevait sur un
escarpement rougeâtre, au-dessus d'une petite anse bordée de sable
blanc; tout près de là se trouve le lac Melah, appelé autrefois
l'étang du Bastion, qui communiquait avec la mer par un chenal. Il
y avait au Bastion une petite garnison, un approvisionnement de
poudre, des arquebuses et même de l'artillerie. Le chef des
établissements marseillais, directeur général de toutes les
opérations en Algérie, y résidait, ainsi que l'écrivain son
lieutenant; des gens de métier, des soldats commandés par un chef
appelé caporal, au total une centaine d'hommes, sans compter les
corailleurs, formaient la population du Bastion.
La localité était des plus insalubres et la mortalité très
grande. On s'efforçait pourtant de bien traiter les employés et la
garnison. Tout venait de France, sauf la viande, le pain et les
fèves; on leur apportait du poisson salé, du vin et l'huile
d'olive nécessaire à toute cuisine provençale. La Compagnie
payait aux Turcs un tribut de 1 500 écus d'or et faisait de
nombreux cadeaux aux caïds et aux chefs de la région, qui
eux-mêmes étaient souvent des renégats corses ou provençaux
comme Ramdan, originaire de Nice, qui fut longtemps caïd de Bône.
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