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Quand on a fait cuire une poule et que le vent a dispersé les
plumés, comment s'y prendre pour les rassembler? »
Les consuls eurent à diverses reprises à subir de mauvais
traitements. Alexandre Lemaire, par exemple, fut chargé de chaînes
et conduit au bagne pour une discussion à propos d'une barque
capturée. Le lendemain même de son incarcération, il écrivait
aux échevins de Marseille: « Si je dois m'en fier aux apparences,
vous n'avez rien à craindre pour le pavillon français, ni pour la
sûreté de la navigation. Le fort de l'orage n'est tombé que sur
moi. Il aurait été à souhaiter que l'éclat eût été moindre;
mais, dans mon malheur, je rends grâce à la Providence d'avoir
épargné les intérêts généraux de la nation. Le fardeau aurait
été trop grand si j'avais eu ma peine et celle des autres à
supporter. »
Grâce à l'habileté et surtout à la patience de nos
représentants, il y eut donc pendant un siècle, de 1690 à 1792,
une paix relative entre la France et la Régence. Comme conséquence
de ces relations pacifiques, les Concessions d'Afrique changent de
caractère; jusque-là, la plupart des gouverneurs devaient leur
situation à la faveur du dey et du Divan, comme Sanson Napollon et
Dussault ; ils se faisaient d'abord accepter par les Algériens,
puis obtenaient une commission du roi et constituaient une Compagnie
; ils étaient souvent chargés de missions diplomatiques. Après
1690, les directeurs des établissements français sont désignés
uniquement par les Compagnies; le Divan d'Alger n'intervient pas
dans leur nomination et ne s'intéresse guère à leur personne; ce
sont de simples négociants, étrangers à la politique.
Le Bastion et le cap Rose avaient été abandonnés en 1677, le
premier à cause de son insalubrité, le second parce que le
commerce de ce poste était insuffisant pour la dépense qu'il
occasionnait. Il ne subsista que trois établissements fixes : la
Calle, Bône et Collo. La Calle était le plus important des trois;
c'était une véritable petite colonie, peuplée presque uniquement
de Français; elle était, elle aussi, assez malsaine et la garnison
était fort éprouvée. On avait songé à acquérir Tabarka et, en
1741, des négociations furent engagées avec les Lomellini qui
paraissaient disposés à la vendre; mais le bey de Tunis averti du
projet s'y opposa. Une tentative de coup de main en 1742 n'eut pas
plus de succès que celle de Sanson Napollon.
Dans la seconde moitié du dix-huitième siècle, le commerce
français fut très prospère en Barbarie. La Compagnie Royale
d'Afrique, au capital de 1200 000 francs divisé en 1 200 actions,
garda l'exploitation des Concessions d'Afrique pendant près de
soixante ans, de 1740 à 1793; ce fut la seule de toutes les
Compagnies de
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