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C'était un ci-devant noble qui
avait adhéré aux principes de la Révolution; sa mission
avait pour objet l'inspection des consulats, le règlement
de toutes les affaires en litige et aussi une enquête sur
la conduite des consuls d'Alger et de Tunis, Vallière et
Devoize, désignés tous deux comme suspects. Incompétent,
maladroit, brouillon, intrigant, sectaire et hypocrite, cet
envoyé extraordinaire était vraiment, comme le dit M. Fr.
Charles-Roux, un extraordinaire envoyé. Il commit toutes
les sottises possibles, tant à Alger qu'à Tunis, jusqu'au
jour où il fut destitué par un arrêté du 20 ventôse an
V (10 mars 1797).
A Vallière, destitué par Herculais et embarqué pour la
France ainsi que son chancelier Astoin Sielve, avait
succédé, le 28 brumaire an IV (18 novembre 1795), l'ancien
conventionnel Jeanbon Saint-André. Le Directoire avait fini
par transiger sur l'affaire de Meïfrund, auquel une
indemnité de 200 000 livres devait être allouée en
échange de ses biens confisqués; mais une saute d'humeur
du dey, qui avait fini par se désintéresser de Meïfrund,
dispensa le Directoire de délier les cordons de la bourse.
Cependant l'ancienne amitié ne se retrouva pas et on ne
tira plus rien de la Régence que par l'intermédiaire des
juifs Bakri et Busnach, qui firent chèrement payer leurs
services, d'autant plus que l'argent comptant manquait et
qu'on n'avait à leur offrir que des traites. Heureusement,
les victoires de Bonaparte, que Jeanbon Saint-André sut
faire valoir avec habileté, le châtiment de Venise, la
libération des esclaves musulmans de Gênes et de Livourne
relevèrent notre prestige. Non sans quelque exagération
d'ailleurs et avec l'emphase de l'époque, Jeanbon
Saint-André, en remettant les sceaux à son successeur
Moltedo, le 6 mai 1798, lui dit: «J'avais trouvé ici la
France à genoux: je vous la laisse debout. » |
BONAPARTE
ET LA RÉGENCE |
En juin 1798, l'armée
française, se rendant en Égypte sous les ordres de
Bonaparte, s'empara de Malte et mit fin à la domination des
Chevaliers. L'événement, annoncé au consul de France à
Alger par une lettre de Bonaparte et une note diplomatique
envoyée de Paris, fut accueilli avec joie dans la Régence.
Aussi le Divan resta-t-il longtemps sourd aux injonctions de
la Porte, qui lui ordonnait de déclarer la guerre à la
République à la suite du débarquement des Français en
Égypte. Le dey Mustapha finit par obéir d'assez mauvaise
grâce et fit emprisonner le consul Moltedo, le vicaire
apostolique, le personnel du consulat et une douzaine de
résidents; mais leur captivité fut bénigne et cessa
quelques jours après le départ de l'ambassade turque qui
était venue la demander. |
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