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  Les relations de la France avec l'Algérie avant 1830.  
     
   La créance s'élevait, d'après Bakri, à 7 943 000 francs : le Consulat autorisa le paiement d'un acompte de 3 726 000 francs. Les choses restèrent en l'état jusqu'à la fin de l'Empire. Le dey s'irritait des retards, d'autant plus qu'une partie des marchandises livrées par les Juifs lui appar­tenaient. Dubois-Thainville avait été remplacé en 1815 comme consul général à Alger par Pierre Deval, fils d'un drogman de l'ambassade de France à Constan­tinople ; il parlait le turc et l'arabe et ne manquait pas de finesse, mais il avait une mentalité toute levantine, usant volontiers de voies obliques et de ruses, ce qui lui valait d'être peu considéré. Deval eut au début une attitude très conciliante, comme le lui prescrivaient d'ailleurs ses instructions et promit la prompte liquidation de cette affaire. En 1819, les Juifs réclamaient 24 millions, mais déclarèrent bientôt se contenter de 7 millions pour solde de tout compte. Le gouvernement de la Restauration reconnut la dette et une convention du 28 octobre 1819, approuvée par la Chambre des députés le 24 juillet 1820, décida que la somme de 7 millions sur laquelle on était tombé d'accord serait payée par le Trésor public.
 
Les droits de créancier du dey étaient passés sous silence dans l'acte de 1819 ; il ne connut probablement pas la teneur exacte de l'acte et ne l'aurait d'ailleurs sans doute pas compris. Il l'approuva et se déclara satisfait. Mais, aussitôt la loi promulguée, de nombreuses oppositions aux ordonnances de paiement furent formées par les créanciers de Bakri et de Busnach. En conséquence, 4 500 000 francs seulement furent payés et une somme de 2 500 000 francs fut versée à la Caisse des dépôts et consignations, en attendant que les tribunaux se fussent prononcés. Un acte public destiné à faire droit aux réclamations du dey eut pour conséquence de rendre légale sa spoliation. Dans cette affaire, le gouvernement français et le dey d'Alger furent également dupés par Jacob Bakri.
Husseïn s'attendait à être payé; il ne comprenait rien aux lenteurs de notre procédure et aux règlements de notre comptabilité. Deval fut chargé de lui expli­quer les causes qui retardaient le paiement : tâche ingrate dans laquelle il réussit mal : « Suis-je responsable, disait le dey, des obligations que peuvent avoir contractées deux maisons juives? S'il était dû au roi de France de l'argent par un de mes sujets, justice lui serait rendue dans les vingt-quatre heures. » On lui devait de l'argent, on lui avait promis de le lui rendre et on ne le lui rendait pas. Ces lenteurs l'irritaient de plus en plus.
Les Juifs, craignant pour leurs têtes, se gardaient bien de retourner à Alger; le dey demandait leur extradition et accusait le consul d'être leur complice, de s'être laissé acheter par eux. S'entêtant de plus en plus, Husseïn écrivit directement au roi, accusant Deval de concussion, demandant son rappel, réclamant l'arrestation
 
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