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L'entreprise se heurtait à une hostilité violente de l'Angleterre,
qui, établie à Gibraltar, à Malte, aux Iles Ioniennes, était
très désireuse de maintenir à son profit le statu quo
méditerranéen. Le prince de Polignac était apparenté à la haute
société anglaise et le duc de Wellington se félicitait de son
avènement au pouvoir. Il lui fallut bientôt en rabattre : "
Je considérais Polignac, dit-il, comme borné, mais loyal.; c'est
en réalité un des hommes les plus habiles et les plus faux que je
connaisse. "
Wellington, chef du cabinet anglais, avait comme ministre des
Affaires étrangères lord Aberdeen. Il était représenté à Paris
par lord Stuart, qui ne manquait pas d'esprit, mais qui était
dépourvu de tact et de discrétion. On lui reprochait à Londres
ses dépêches obscures et contradictoires : " Lord Stuart,
disait Wellington, ne comprend jamais ce qu'on le charge de dire aux
ministres français, ni ce que ceux-ci lui répondent. " Dans
l'Afrique du Nord, les consuls anglais Thomas Read à Tunis,
Warrington à Tripoli, Saint-John à Alger intriguaient de toute
manière contre la France. Arrivé à Alger en 1827, M. Saint-John
était un homme fort intelligent, connaissant très bien le terrain,
animé d'une haine contre les Français qui allait jusqu'à la
passion. Il rendit somme toute un assez mauvais service à son pays
en encourageant le dey à la résistance, lui assurant qu'il serait
soutenu par l'Angleterre.
Vers la fin de 1829 se place un curieux épisode: une tentative du
prince de Polignac pour combiner une alliance entre la France et
l'Égypte contre les Barbaresques. On proposa au pacha d'Égypte,
Méhémet-Ali, de s'emparer des Régences avec le concours
pécuniaire de la France, qui l'aurait en outre garanti contre
l'hostilité des autres puissances; on en vint même à lui proposer
la coopération effective de la flotte française et on chercha
aussi à obtenir un firman de la Porte autorisant cette entreprise.
La combinaison franco-égyptienne, dont l'idée première
appartenait au consul de France à Alexandrie, M. Drovetti, n'avait
aucune chance de succès. C'était associer la question d'Orient à
la question d'Alger et l'Angleterre était encore plus hostile à
l'alliance de la France avec Méhémet-Ali qu'à nos projets en
Afrique; elle nous le fit bien voir en 1840. Les autres puissances
ne faisaient pas d'objections, mais regardaient en général la
combinaison égyptienne comme irréalisable : " Croyez-vous,
disait Nesselrode, que les Égyptiens soient capables d'aller à
Alger? Comment n'osez-vous pas détruire vous-même ce nid de
pirates et vous y établir pour nous en délivrer à jamais? "
Polignac se décida à renoncer à son projet et l'expédition
purement française fut décidée.
Les allures de la diplomatie anglaise furent assez confuses. Lord
Aberdeen offrit d'abord la coopération de l'Angleterre, ce qui eût
mené à un condominium,
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