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Il est difficile de savoir si ces
offres étaient sincères et dans quelle mesure ces chefs
auraient tenu leurs promesses. A ce moment d'ailleurs, Rovigo
n'était plus là; atteint d'un cancer à la gorge, par
lequel, dirent les indigènes, Allah le punit de ses
mensonges, il était parti pour la France, où il mourut en
juillet 1833. Les intérimaires qui le remplaçaient n'avaient
pas qualité pour engager une négociation de ce genre. |
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LE GÉNÉRAL VOIROL
(AVRIL 1833 - SEPTEMBRE 1834) |
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L'intérim fut fait d'abord par
Avizard, puis par Voirol. Ce dernier resta dixsept mois à
Alger, plus longtemps qu'aucun des titulaires qui l'avaient
précédé; le gouvernement voulait évidemment réfléchir
avant de donner aux possessions d'Afrique une organisation
définitive et attendre les conclusions de la Commission
d'enquête qui avait été envoyée en Algérie. Voirol était
un homme sage et raisonnable, qui laissa de bons souvenirs
parmi les colons et les indigènes. Mais il était gêné par
la crainte de faire plus que ne comportait sa situation
provisoire. Il était d'ailleurs en conflit avec le général
Desmichels, qui commandait à Oran.
Voirol fut cependant le créateur du bureau arabe. En matière
de politique indigène, nous avions agi jusque-là
véritablement à tort et à travers, sans connaître ni nos
amis, ni nos adversaires. L'agha des Arabes que nous avions
institué, et qui avait été tantôt un Français, tantôt un
indigène, n'avait joué aucun rôle. Nous en étions toujours
réduits pour nos relations avec les tribus aux interprètes
maures ou juifs. Le cabinet arabe qui se trouvait dans les
bureaux du duc de Rovigo n'avait aucune notion de la langue du
pays et ne pouvait rien contrôler. Sur les conseils du
général Trézel, chef d'état-major, on résolut de créer
un bureau qui concentrerait toutes les affaires concernant les
indigènes, réunirait les documents et mettrait chaque jour
sous les yeux du général en chef la situation du pays et la
traduction des lettres les plus importantes. Ce serait à la
fois un organe de renseignements pour les opérations de
guerre et d'administration pour toutes les affaires
indigènes.
Dans ce domaine, tant vaut l'homme, tant vaut l'institution.
Le premier chef du bureau arabe fut La Moricière, jeune
officier du génie qui avait organisé les zouaves et appris
l'arabe. Esprit ouvert et cœur généreux, il aimait les
indigènes et savait s'en faire aimer. Les actes du duc de
Rovigo avaient jeté parmi eux une juste méfiance; La
Moricière les ramena par la franchise de ses manières. Il
obtint de Voirol la liberté des marabouts de Koléa que
Rovigo avait fait emprisonner et les reconduisit lui-même à
leurs familles sans escorte française. |
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