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  LES DÉBUTS ET LES HÉSITATIONS (1830-1834).  
     
  
Il ne prit pas le titre de sultan, mais d'emir-el-moumenin, prince des croyants, ou de khalifa du sultan du Maroc. Il envoya des présents à Moulay-Abd-erRahman et fit faire la prière en son nom.
Abd-el-Kader est né des nécessités de la situation, de nos indécisions, de l'anarchie dans laquelle nous laissions les indigènes. Nous avions détruit les Turcs et nous n'avions rien su mettre à leur place. Il se trouva que l'homme était à la hauteur des circonstances. Il fut notre plus noble et notre plus illustre adversaire.
Le général Boyer, à Oran, restait tranquille spectateur des commencements du pouvoir d'Abd-el-Kader. Il ne le croyait pas redoutable; il pensait que les tribus ne pourraient jamais rester longtemps d'accord et voyait déjà plusieurs grands personnages se prononcer contre le jeune chef. Il n'eut d'ailleurs pas longtemps à le combattre, car il fut remplacé par le général Desmichels, qui prit possession de son commandement le 23 avril 1833.
 

LE TRAITÉ DESMICHELS

 
Desmichels venait à Oran dans des conditions particulières, qui expliquent les événements ultérieurs. Il correspondait directement avec le ministre de la Guerre, sans passer par l'intermédiaire d'Alger et du général en chef, qui n'était d'ailleurs qu'un intérimaire, Voirol. Comme il était facile de le prévoir, il en résulta des froissements et des heurts. Sous Clauzel, il y avait eu conflit entre Alger et Paris; sous Rovigo, conflit entre le général en chef et l'intendant civil; avec Voirol et Desmichels, il y eut conflit entre Alger et Oran. Desmichels chercha d'abord à donner aux indigènes l'impression de notre force. Il razzia la tribu des Gharabas, qui était venue camper dans la plaine du Tlélat, à quelques lieues d'Oran. Il occupa Arzew et Mostaganem et livra à Abd-el-Kader un vif combat à Tamezouar, chez les Smélas. L'émir de son côté avait occupé la ville de Tlemcen. Dans ses vers, il la compare à une amie dont il aurait conquis l'affection : " En me voyant, Tlemcen m'a donné sa main à baiser, je l'aime comme l'enfant aime le coeur de sa mère, je l'ai tenue par le grain de beauté qu'elle avait sur une joue; elle me dit : donne-moi un baiser et ferme-moi la bouche avec la tienne". L'émir ne réussit pas cependant à s'emparer de la citadelle, le Méchouar, dont les Turcs et les Koulouglis lui refusèrent l'entrée; il fit jeter par-dessus les murs avec des frondes les oreilles des têtes coupées, en attendant, dit-il, la chair de porcs que les chrétiens devaient leur apporter.
Cependant Desmichels n'avait plus sa belle ardeur du début. Il voyait avec découragement que les opérations militaires demeuraient sans résultat; la disette commençait à se faire sentir à Oran, Abd-el-Kader ayant défendu aux indigènes de fréquenter nos marchés.
 
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