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  LES DÉBUTS ET LES HÉSITATIONS (1830-1834).  
     
  
Mais, comme le remarque Pellissier de Reynaud, ce ne sont pas d'ordinaire les gens aisés et ayant une situation acquise qui émigrent et fondent une colonie. Il y eut d'ailleurs parmi ces premiers émigrants quelques véritables commerçants, quelques capitalistes même, tel Lacroutz, venu comme représentant de la maison Seillière de Marseille, qui devint rapidement un des commerçants les plus considérables d'Alger.
 

CLAUZEL ET LA COLONISATION

La colonisation fut la constante préoccupation de Clauzel, autant que le maintien de la domination française et plus que l'administration de notre nouvelle colonie. Il l'adopta résolument, après une rapide enquête sur les ressources du pays, la défendit avec courage dans les conseils du gouvernement et s'appliqua à la réaliser par tous les moyens.
Il s'efforça de réfuter les objections qu'on élevait contre la colonisation de l'Algérie. L'hostilité des indigènes, entretenue d'ailleurs par nos fâcheuses indécisions, ne lui paraissait pas une raison suffisante pour renoncer à établir des Européens dans le pays. Il préconisait à l'égard des musulmans une politique de justice et d'humanité, convaincu que nos adversaires deviendraient plus tard nos meilleurs auxiliaires. Il fallait respecter leurs mœurs et leurs croyances, s'appliquer à les rapprocher de nous, rappeler à Alger ceux qui s'en étaient momentanément éloignés, leur ouvrir les rangs de notre armée. Quant à la prétendue insalubrité de l'Algérie, Clauzel, qui avait vécu dans des contrées plus malsaines, estimait qu'elle irait en s'atténuant à mesure que le pays serait défriché et assaini et déclarait l'acclimatement des Européens parfaitement possible. L'absence de terres vacantes et en quantités illimitées comme en Amérique était évidemment un gros obstacle, mais il ne paraissait pas insurmontable; le Domaine avait des terres qu'il pouvait concéder gratuitement comme cela se faisait en Amérique et on pouvait en acheter aux indigènes qui les cédaient volontiers.

Sur un seul point, Clauzel faisait fausse route : il croyait, comme la plupart de ses contemporains, l'Algérie appelée à produire du sucre, du café, de l'indigo, en un mot des cultures tropicales, dont la notion, pour les hommes de ce temps, s'identifiait en quelque sorte avec celle de colonie. Il pensait sans cesse à Saint-Domingue et aux États-Unis du Sud. Le botaniste Desfontaines, qui avait parcouru l'Algérie avant la conquête, fit quelques réserves ; sans nier la possibilité d'y cultiver le coton et l'indigo, il pensait à juste titre qu'on y ferait surtout du blé, de la vigne, des céréales.
" Il ne faut pas plus de dépenses, disait Clauzel, pour coloniser en occupant que pour occuper sans coloniser. "

 
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