Quant aux éléments de peuplement, il était éclectique. Il
donnait bien entendu la préférence à l'élément français;
il faisait une place à l'élément militaire et espérait
qu'une fois libérés un certain nombre de soldats resteraient
dans le pays et feraient venir leurs familles.
" Nos armées, disait-il, comptent beaucoup plus de
prolétaires que de propriétaires, et il est permis de croire
que, sur 3 000 hommes qui reviennent d'Afrique chaque année,
les soldats prolétaires préféreraient pour la plupart y
rester avec la perspective d'y acquérir une petite
propriété que de retourner en France pour n'y rien
posséder. " On leur donnerait six arpents de terre, des
outils et des vivres pendant six mois. Clauzel n'excluait
d'ailleurs pas les étrangers et voulait détourner vers
l'Algérie une partie des 200 000 émigrants qui se
dirigeaient chaque année vers l'Amérique; comme c'étaient
surtout des Allemands, Clauzel envoya quelques agents de
recrutement dans la vallée du Rhin, à Trèves et à Mayence
notamment.
A côté de la petite colonisation prolétarienne, Clauzel
voulait faire une place aux grandes sociétés financières.
En octobre 1830, il créa la Ferme-Modèle, organisée en
société anonyme par actions de 500 francs. On attribua à
cette société la ferme dite Haouch-el-Dey comprenant
1 000 hectares à l'embouchure de l'Harrach. La location
était consentie pour une période de 9, 18 ou 27 ans, avec
faculté de résiliation et moyennant le prix d'un franc par
hectare; la société pouvait devenir propriétaire à la
condition de payer le prix du fermage capitalisé au denier
vingt. Elle était tenue en outre de céder la moitié de son
domaine aux colons qui viendraient s'y installer. Cette ferme
devait être pour la colonisation un encouragement et un
exemple. |