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Elles cherchèrent avant de
partir à réaliser leur fortune. Comme les Européens
n'avaient que de faibles capitaux et que tout le monde,
vendeurs et acheteurs, envisageait la possibilité de
l'évacuation, les aliénations d'immeubles furent faites
moyennant le paiement d'une rente perpétuelle. Ce mode de
transaction, très conforme d'ailleurs au droit musulman,
garantissait à l'acheteur qu'en cas d'évacuation il ne
perdrait jamais que quelques annuités et laissait entrevoir
au vendeur la possibilité de rentrer dans son bien. Les
rentes furent en général calculées à un taux très bas.
Quelques Européens employèrent des procédés tout à fait
déloyaux et les indigènes ne furent pas en reste avec eux.
Lorsque toutes les propriétés de la banlieue d'Alger eurent
été vendues, on voulut acheter dans la Mitidja. On acheta
d'abord aux Maures, puis aux gens des tribus. On achetait sans
voir l'immeuble, sur des titres faux; les indigènes vendaient
la même propriété à plusieurs personnes, trompaient sur la
contenance, vendaient même des immeubles inexistants. Cet
accaparement de la propriété foncière par des spéculateurs
créait une foule d'embarras à l'administration et faisait
monter le prix des terres, au grand détriment de la
colonisation et des véritables travailleurs.
Cependant quelques vrais colons s'étaient mis à l'œuvre
dès le printemps de 1831; parmi eux se trouvaient le docteur
Chevrau, les frères Fougeroux, Vallier, Roches, père de
l'écrivain qui fut secrétaire d'Abd-el-Kader, Colombon. Ces
premiers propriétaires se groupèrent en une association
coloniale. Mais lorsqu'on vit que la pacification ne faisait
aucun progrès, les exploitations languirent et on se livra au
brocantage des terres en attendant des temps meilleurs. |
UN ESSAI DE
COLONISATION OFFICIELLE |
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Dans le courant de 1831 étaient
arrivés à Alger 500 émigrants allemands et suisses
enrôlés pour l'Amérique et abandonnés par l'agent qui les
avait recrutés. Ils arrivèrent à Alger dans un état de
complet dénuement; on ne savait qu'en faire; on les logea
autour d'Alger sous des tentes et on leur distribua des
vivres. Rovigo voulut leur faire donner des terres et demanda
à Pichon de caser 650 colons, dont 447 Allemands et Suisses
et environ 200 Français; on aurait attribué deux arpents de
terre à chaque colon. Pichon répondit qu'il n'y avait point
de terres disponibles. Finalement, on fit choix des deux
localités de Kouba et de Dely-Ibrahim. Le noyau des terres
était à Kouba une ferme appartenant à une mosquée, à Dely-Ibrahim
une autre ferme appartenant à la corporation des janissaires.
Les villages furent construits sur un crédit de 200 000
francs ouvert à l'intendant civil par le ministre de
l'Intérieur. |
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