Les troupes étaient de qualité médiocre. L'Algérie avait perdu
la Légion Étrangère avec ses 6 000 hommes entraînés à la
guerre d'Afrique, cédée à l'Espagne en 1835 par le duc de
Broglie. Le choléra de 1835 fit 2 300 victimes dans l'armée; 4 500
autres étaient indisponibles; d'autres maladies, paludisme et
dysenterie, éprouvaient les troupes. La proportion des différentes
armes était réglée d'après les principes adoptés pour la guerre
d'Europe et ne convenait pas au pays. Point de batteries de
montagne, trop peu de cavalerie, trop peu de génie et de train; des
voitures à quatre roues dans un pays sans routes alors qu'il aurait
fallu des mulets. L'état moral était mauvais; il y eut des cas
d'indiscipline, des mutineries même. Les discussions politiques
étaient fréquentes entre officiers et se terminaient souvent par
des duels. Enfin les méthodes de guerre n'étaient pas adaptées au
pays : " Nous nous obstinons, disait Walsin Esterhazy, à agir
par masse contre un pays qui n'a point d'obstacles à nous opposer;
nous nous lassons à chercher une résistance que nous ne
rencontrons jamais, à vouloir sans cesse saisir ce qui nous
échappe, à courir à pied après un ennemi à cheval. Ce n'est
point en cherchant à éloigner de nous l'ennemi, en essayant de
faire du mal à coups de canon à de légères lignes de tirailleurs
que nous parviendrons à le vaincre; ce n'est au contraire qu'en
cherchant le moyen de l'atteindre, en le saisissant corps à corps
et en le terrassant sur son propre terrain que nous en triompherons,
et c'est en lui prouvant que la fuite, son seul moyen de défense
contre nous, ne peut plus le dérober à nos coups que nous le
soumettrons. "
La première question qui se posait en 1834 était celle du choix
du gouverneur général. Parmi les noms cités se trouvaient le
maréchal Clauzel, le duc Decazes, le général Damrémont ; on
songea aussi au général Guilleminot, au duc de Mortemart ; les
préférences de Thiers étaient pour un gouverneur civil. A la
surprise générale, le choix du roi se porta sur Drouet d'Erlon,
vieillard de soixante-dix ans, auquel on ne songeait pas plus pour
Alger qu'il ne songeait lui-même à y être envoyé quinze jours
avant sa nomination. Ce choix avait été sans doute proposé par le
général Gérard, qui avait remplacé Soult au ministère de la
Guerre et qui fit appel à un de ses vieux camarades.
Drouet d'Erlon était un homme excellent, mais faible et qui
n'avait plus assez de forces physiques et intellectuelles pour l'œuvre
à entreprendre. Sa droiture de jugement lui faisait discerner au
conseil de gouvernement les meilleurs avis, mais il hésitait à les
mettre à exécution. On abusait au détriment de la chose publique
de son manque de mémoire. Il amena comme intendant civil M.
Lepasquier, préfet du Finistère, actif et conciliant; comme chef
de la Justice, M. Laurence, député, ancien membre de la Commission
d'Afrique, tout acquis à la cause de l'occupation.
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