Il hésitait cependant; tantôt il paraissait disposé à accepter,
tantôt il se fiait à ses forces et à l'appui que lui avaient fait
espérer les Turcs. En juillet 1837, notre chargé d'affaires en
Turquie signalait que des émissaires politiques passaient en
Afrique et qu'une flotte commandée par le capitan-pacha était
envoyée à Tripoli et à Tunis. On protesta auprès de la Porte et
l'escadre de l'amiral Lalande alla mouiller devant Tunis.
Lorsqu'il apparut que l'on n'aboutirait pas à traiter avec Ahmed,
Damrémont lui adressa un ultimatum et se prépara à la lutte. Des
troupes furent rassemblées au camp de Medjez-Ahmar, sur la
Seybouse. Se rappelant ce qui était advenu à Clauzel et craignant
d'être comme lui désavoué, le gouverneur demanda un ordre formel
et l'obtint. Il entreprit alors la marche sur Constantine.
Cette fois, l'armée était forte de 12 000 hommes ; elle
emmenait avec elle, outre 16 pièces de campagne, un parc de siège
composé de 17 bouches à feu et un convoi portant dix-huit jours de
vivres. Damrémont dirigeait l'expédition en personne; il avait
pour chef d'état-major le général Perrégaux ; le général
Valée commandait l'artillerie, le général Rohault de Fleury le
génie. L'armée quitta Medjez-Ahmr le 1er octobre 1837; le temps
fut heureusement moins mauvais que l'année précédente et on
arriva en bon état sous les murs de Constantine.
Pas plus que l'année précédente, l'ennemi n'avait essayé de nous
livrer bataille en rase campagne; il avait concentré dans la ville
tous ses moyens de défense. Ben-Aïssa conduisait la résistance,
pendant qu'Ahmed courait le pays avec ses cavaliers; il avait son
infanterie composée de Turcs et de Kabyles, une milice urbaine bien
armée, des volontaires accourus du dehors; en tout 6 000 hommes,
avec des munitions et des vivres pour deux mois.
Le Koudiat-Aty était tout indiqué comme point d'attaque; on
décida que la batterie de brèche y serait établie et on résolut
d'armer aussi le Mansoura pour prendre à revers les défenses de la
place. Les assiégés tentèrent à plusieurs reprises de troubler
les travaux, mais leurs sorties et les diversions qu'opérait la
cavalerie d'Ahmed furent également repoussées. Le 11, les
batteries de brèche étaient prêtes sur le Koudiat-Aty. Le
général en chef envoya une sommation à Ben-Aïssa, qui répondit
fièrement qu'il ne manquait ni de poudre, ni de vivres, qu'il en
donnerait aux Français s'ils en avaient besoin, mais qu'il se
défendrait jusqu'à la mort. Le moment suprême approchait,
lorsque, dans la journée du 12, Damrémont fut tué d'un boulet en
plein corps pendant qu'il examinait la brèche et causait avec le
duc de Nemours. Perrégaux, qui arrivait, fut renversé lui aussi
avec une blessure mortelle. Valée prit le commandement et ordonna
l'assaut pour le lendemain. Trois colonnes d'attaques avaient été
formées sous la conduite des colonels La Moricière, Combe et
Corbin.
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