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L'état-major comprenait l'agha-el-asker, général de
l'armée régulière, le bach-tobdji, chef de l'artillerie,
le chef des secrétaires, le chef des chaouchs, deux intendants, des
porte-drapeaux, des musiciens. L'infanterie portait le seroual
ou pantalon bleu, le caban brun-marron avec capuchon, la chéchia,
un gilet, une chemise, des belras ou babouches jaunes. Les
cavaliers avaient un uniforme écarlate. Les gradés, vêtus de drap
plus fin, amarante, écarlate ou bleu foncé, portaient leurs
insignes en forme de sabres ou de croissants, avec des devises
arabes brodées sur les manches. L'émir avait institué une
décoration; c'était une plaque sur laquelle étaient inscrits les
mots : Nasser-ed-din, champion de la religion; cette
décoration donnait droit à certains privilèges. L'avancement
était laissé entièrement au choix du sultan. La ration consistait
en semoule et en beurre fondu. La solde était de 6 réaux par mois
pour les fantassins (8 francs), 7 réaux pour les cavaliers. Il y
avait un service de santé, un code de justice militaire. Les
instructeurs étaient des soldats de Tunis, de Tripoli, des
déserteurs de l'armée française, des étrangers européens.
La grosse difficulté était de se procurer des armes, des munitions
et surtout des canons. Les fantassins avaient des fusils français
avec la baïonnette; l'émir était autorisé par le traité de la
Tafna à s'en procurer en France; d'autres furent pris à la Macta,
volés à des sentinelles, vendus par des soldats. Du Maroc et de
Gibraltar vinrent beaucoup de mousquetons anglais. La contrebande se
faisait aussi par Oran et Nédroma. Il y avait quelques petits
ateliers de réparation à Mascara, à Tlemcen et à Takdempt. Quant
aux canons, Abd-el-Kader, d'après Daumas, avait 36 pièces, dont 12
seulement pouvaient tenir la campagne, 100 canonniers, peu de
projectiles. En octobre 1838, le maréchal Valée lui envoya 400
obus. Des essais de fonte de canons et de fabrication de poudre
furent faits à Tlemcen, à Takdempt et à Miliana ; ils réussirent
médiocrement.
En temps de paix, un bataillon de fantassins de 1 000 hommes avec
250 cavaliers, 30 artilleurs, 2 ou 3 pièces de canon était
détaché auprès de chaque khalifa ou gouverneur de province, le
noyau central restant auprès de l'émir.
En somme, les réguliers d'Abd-el-Kader, si médiocres qu'ils
fussent, lui donnaient une évidente supériorité sur les chefs
indigènes. Même en face des forces françaises, ils montrèrent
souvent beaucoup de résistance; ils joignaient à leur bravoure
native une certaine discipline, pouvaient tenir en bataille rangée
ou couvrir une retraite.
Lorsque nous eûmes atteint Mascara et Tlemcen, l'émir vit le
danger de placer ses approvisionnements dans des villes aussi
rapprochées de la mer et porta sa véritable ligne de défense à
la lisière méridionale du Tell. Il s'efforça de créer là une
série d'arsenaux et de places de défense qu'il espérait devoir
être hors de notre atteinte.
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