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  L' OCCUPATION RESTREINTE (1834-1840).  
     
  
Les déserteurs, méprisés des musulmans, menaient une existence misérable; on leur prodiguait l'insulte et la menace. Parmi les plus notables fut le chasseur d'Afrique Moussel, qui prétendait avoir été poussé à la désertion par les brutalités d'un adjudant; s'étant trouvé en sa présence dans un combat, il le décapita et le mutila; lui-même fut plus tard repris et passé par les armes. Le chasseur d'Afrique Dumoulin, dit Abdallah, finit sa carrière au Maroc; Gestringer, dit Hamidou, de Munich, tout à fait islamisé, fut instructeur de l'infanterie de l'émir. Hulsen, dit Mustapha, Javal, dit Abdallah, d'autres encore, pour la plupart déserteurs de la Légion ou du bataillon d'Afrique, traînèrent une existence misérable. En somme, sauf Léon Roches, les éléments européens dont disposait Abd-el-Kader étaient des plus médiocres; il ne pouvait d'ailleurs pas les employer à son gré, en raison des jalousies et des haines de son entourage.
L'habitude de faire des prisonniers était inconnue des indigènes avant Abd-el-Kader ; quiconque tombait aux mains de l'ennemi était décapité et mutilé. L'émir entreprit de réagir et supprima, au grand mécontentement des indigènes, l'usage de payer les têtes : « Combien donnes-tu pour un prisonnier. - Huit douros. - Et pour une tête coupée? - Vingt-cinq coups de bâton sur la plante des pieds. » Les prisonniers étaient bien traités lorsqu'ils étaient auprès de l'émir, mais, lorsque celui-ci s'éloignait, on leur infligeait toutes sortes de vexations; c'est en son absence qu'eut lieu le massacre des prisonniers de Sidi-Brahim. Les aventures romanesques et merveilleuses des prisonniers de l'émir ont été racontées dans divers ouvrages et sans doute embellies et dramatisées. Virginie Lanternier, fille d'un colon de Dely-Ibrahim, capturée et emmenée au Maroc, y devint la femme du sultan Sidi­Mohammed.
 

LES PROGRÈS D'ABD-EL-KADER DE 1837 A 1839

 
Ainsi, de 1837 à 1839, Abd-el-Kader a fait de remarquables efforts pour organiser son administration et surtout son armée. S'il ne réussit pas à créer un royaume arabe, c'est que la période de paix fut trop courte et qu'il rencontra trop d'obstacles de tous genres chez les indigènes. La rupture était d'ailleurs inévitable entre la France et lui. Les difficultés commencèrent dès le lendemain de la signature du traité de la Tafna, en raison des erreurs et des obscurités de rédaction qui le rendaient inexécutable. Le maréchal Valée, après la prise de Constantine, avait demandé au ministère comment il fallait interpréter l'article 2 du traité d'après lequel la France se réservait « la plaine de la Mitidja bornée à l'Est jusqu'à l'Oued-Keddara et au delà ».
 
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