Page précédente HISTOIRE DES COLONIES FRANÇAISES - Tome2 - Retour page Table des matières ALGÉRIE - LIVRE II  - CHAP. II Page suivante
  L' OCCUPATION RESTREINTE (1834-1840).  
     
   Une grande partie des centres aujourd'hui si florissants du Sahel et de la Mitidja n'ont pas d'autre origine que les grandes fermes acquises au début de la conquête par des Français; leurs premiers habitants ont été les cultivateurs appelés à vivre sur ces grands domaines et les ouvriers venus se fixer à proximité des camps.
Parmi ces grands colons du début, le plus remarquable, le plus entreprenant, le plus généreux, le plus actif fut sans doute le baron de Vialar. En 1832, il avait entrepris un grand voyage dans le Levant, emportant des lettres pour le pacha d'Égypte, mais il s'arrêta à Alger et s'y fixa : " Je crus reconnaître, disait-il plus tard, qu'il y avait là de grandes entreprises à tenter. Je vis que le sol était fertile et l'insalubrité du climat à peu près chimérique. Les obstacles que nous avions à surmonter de la part des indigènes me parurent bien moindres que je ne me l'étais imaginé. Je crus entrevoir le temps où cette belle contrée, magnifique don de la Providence, encore aujourd'hui stérile, serait fécondée par le travail et où plus de vingt départements français accroîtraient la richesse et la puissance de mon pays. " Il acheta un domaine à Tixeraïn, un autre à Kouba. Il fit venir des ouvriers du Languedoc pour l'aider à cultiver lui-même une partie de ses terres, traita pour les autres avec des fermiers ou métayers français, mahonnais, indigènes ; en 1834, il acheta des domaines dans la Mitidja, Baraki avec le docteur Baudens, Khadra avec de Tonnac. La même année, il se rendit avec le chef du bureau arabe, Pellissier de Reynaud, au marché de Boufarik ; les deux Européens ne furent pas attaqués, mais les indigènes refusèrent de rien leur vendre, sauf un chien. De Vialar ne se découragea pas et fonda un prix pour le premier Européen qui conduirait à Boufarik une voiture chargée de marchandises, prix qui ne fut gagné que sept mois après.
De Tonnac, associé de Vialar à Khadra, avait appris l'arabe, portait le burnous, vivait à l'indigène de couscouss et de café. Lorsqu'il voulut prendre possession de sa terre, il partit seul avec un cuisinier, s'installa au pied d'un arbre et fit faire le café; il en offrit aux indigènes, distribua des friandises aux enfants, puis expliqua qu'il avait acheté la ferme, mais entendait ne rien changer aux usages établis; il s'offrit même à restaurer une koubba en ruines qui se trouvait sur le territoire de la tribu. En compensation, les indigènes l'aidèrent à construire sa maison. Tels étaient ces premiers colons, qu'on représentait en France comme des accapareurs et des exploiteurs. Ils savaient se faire aimer des indigènes, les attacher à leurs intérêts, s'en faire des auxiliaires.
Le prince de Mir, Polonais réfugié en France en 1830, était un homme étrange. Quoiqu'il fût sans ressources, son titre, ses manières, ses promesses éblouirent tout le monde et Drouet d'Erlon, en 1835, lui concéda autour de la Rassauta plus de 4 000 hectares de terres domaniales.
 
  205  
Page précédente Retour page Table des matières Page suivante