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  LA CONQUÊTE INTÉGRALE - BUGEAUD ET ABD-EL-KADER (1840-1848)  
     
   Elle était disposée en un grand losange avançant par un de ses angles; les 18 bataillons d'infanterie formaient autant de petits carrés, avec une compagnie sur chaque face et une compagnie de soutien au milieu. La Moricière commandait en second ; les colonels Cavaignac, Pélissier, Gachet commandaient l'infanterie, les colonels Tartan, Morris, Yusuf la cavalerie. La rencontre eut lieu le 14 août 1844 sur les bords de l'Oued-Isly, à trois kilomètres au Nord-Ouest d'Oudjda. L'immense cavalerie marocaine, s'ébranlant au galop, essaya de déborder l'armée française en assaillant les flancs et la queue de la colonne, mais l'infanterie reçut la charge avec une solidité inébranlable et répondit par des feux de salve. L'ennemi s'arrêta et tourbillonna. Le grand losange toujours fermé reprit sa marche et s'ouvrit pour laisser passer la cavalerie. Yusuf à gauche avec les spahis balaya tout ce qui se trouvait devant lui et s'élança sur le camp marocain; 5 escadrons de chasseurs vinrent le soutenir. Sur la droite, le colonel Morris se trouvait engagé avec 550 chasseurs au milieu de 6 000 cavaliers; il ne recula pas, lança ses escadrons l'un après l'autre et soutenu par 3 bataillons, eut finalement l'avantage. A midi, la bataille était gagnée; elle avait été peu meurtrière même pour l'ennemi, qui laissa 800 morts. Les Français avaient 28 tués et 100 blessés, mais l'armée marocaine avait perdu la tente et le parasol de Sidi-Mohammed,18 drapeaux, 11 pièces de canon; elle avait surtout perdu sa jactance.
Pendant que le maréchal Bugeaud remportait cette brillante victoire, le prince de Joinville opérait contre les villes de la côte marocaine. Avec une escadre de 12 vaisseaux, il avait bombardé Tanger le 6 août, puis s'était porté sur Mogador, où il rencontra une résistance plus vive; mais des compagnies de débarquement s'emparèrent de l'île qui couvre le port et la ville elle-même fut occupée.
Bugeaud songeait à marcher sur Fès : " On peut y aller, écrivait-il au prince de Joinville, avec 20 000 hommes d'infanterie, 3 régiments de cavalerie d'Afrique, une vingtaine de bouches à feu bien approvisionnées et des moyens suffisants pour transporter des vivres pour un mois. " Mais les considérations de politique générale et les engagements pris vis-à-vis de l'Angleterre ne permettaient pas de donner suite à ce projet. A ce moment, la célèbre affaire Pritchard et les incidents de Tahiti mettaient en danger l'entente cordiale, à laquelle Guizot était très attaché. Lord Aberdeen déclara que l'occupation d'un point quelconque du territoire marocain deviendrait nécessairement un casus belli. Il fut convenu que nous ne demanderions ni indemnités, ni cessions territoriales.
Le Maroc ayant sollicité la paix, les négociations furent rapidement menées. Le traité de Tanger (10 septembre 1844) fut une simple reproduction de l'ultimatum ; le sultan s'engageait à interner Abd-el-Kader dans une ville du littoral occidental de son empire au cas où il tomberait entre ses mains.
 
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